Chronique - Le Clapotis des jours



Parce que le « clapotis » nous titille l’oreille et éveille notre curiosité... Glissez en bas de page dans la colonne de droite : vous en saurez plus sur l'origine du clapotis !


NOVEMBRE 2023 – Cette nuit-là, le vent était-il encore un frère ?


Mais qu’à donc fait le vent dans le si beau parc du centre spirituel de Penboc’h ?
Pourquoi s’est-il conduit comme un prédateur déchiquetant plus de 150 arbres séculaires en seulement quelques minutes ? Des centaines d’ailes les habitaient.
Un instant de rage nocturne et le parc s’est retrouvé en haillons.
On ne lutte pas contre le vent. On ne l’apprivoise pas non plus. Le vent ne fait allégeance qu’à lui-même. Il souffle, se déchaine, détruit, puis part mourir on ne sait où !
Le vent… Un mot d’une syllabe qui ne pèse presque rien mais qui a le pouvoir d’effriter l’âme d’un parc magnifique en quelques instants seulement.
Bien sûr, ceux de là-bas auront le courage de replanter d’autres arbres et ainsi, de recréer un petit bout de création.
Bien sûr, nous contemplerons avec une reconnaissance renouvelée les arbres qui restent, se dressant encore entre ciel et terre, juste devant la mer Ils lèveront dans nos yeux, des joies plus précieuses que jamais.
Bien sûr, notre regard passera de l’immensité des vieux pins à l’infini des petites pousses.
Bien sûr, nous verrons mieux les étoiles, la lune et la mer et tout son horizon.
Bien sûr le toit pourtant neuf sera réparé, les vitres remplacées, les ferronneries redressées, les branches tronçonnées, les voitures remboursées et la Vierge de bronze regrimpera sur son socle.
Mais cette nuit-là, si mystérieuse à comprendre, et ce vent-là, indifférent au bien, indifférent au mal, qui non content de s’immiscer, s’insinuer, s’étaler sur le paysage, a voulu tout arracher, broyer, casser, tordre, déchiqueter, ce vent-là était-il encore un frère ?
Voyageurs de nul voyage, pèlerins d’aucune route, les arbres qui se dressaient se sont laissés défaire.
Mais nous, nous tous, saurons-nous déchiffrer enfin, les avertissements du vent et l’abnégation des arbres ?

NOVEMBRE 2023 - Crever la surface des choses


Quelques 200 doigts, cet été, puis cet automne, se plongeaient dans l’argile, en l’abbaye d’En Calcat. Ils n’hésitaient pas à se lancer, ne connaissant pourtant guère d’avance ce qu’il se passerait.
Il faut de l’audace et un véritable courage pour laisser ainsi ses mains avancer dans l’inconnu. Cela suppose de demeurer toujours en recherche, faute de panneau indicateur posé devant soi.
Les doigts animés par beaucoup d’élan vital créent de nouvelles formes.
La philosophe S. Chassant écrivait : « La vie est un luxe qu’il faut vivre avec luxuriance ».
Créer fut donc une véritable luxuriance pour chacun des participants des sessions que nous animions.
Léonard de Vinci recommandait à ses élèves de travailler en n’ayant personne à côté d’eux car ils risqueraient de prendre les yeux de leurs voisins au lieu de scruter la réalité avec les leurs.
Mais il se trouve que lors de nos sessions, nous expérimentons l’exact contraire.
Créer les uns à côté des autres et parfois ensemble, permet le plus souvent d’être touché au plus profond de soi.
La beauté ne jaillit pas du côté de la solitude, dans nos ateliers du moins, mais de personnes qui , solidairement (c’est-à-dire en se stimulant mutuellement) crèvent la surface des choses et des mots, pour découvrir ce qu’il y a dessous.
« Peindre ou sculpter, c’est être l’hôte de quelque chose qui vient du plus loin possible et du plus inconnu. C’est savoir accueillir ce don », disait S. Hantaï.
En se mettant en mouvement vers ce qu’il y a de plus humain au fond de chacun de nous et vers ce qu’il y a de plus humain qui circule entre nous, aidons ainsi notre humanité à mûrir… au moins un petit peu…

NOVEMBRE 2023 – La barque des Ecritures


Nous l’avons constaté une fois de plus : les Ecritures ne cessent de recréer au fond de chacun, un désir toujours neuf de s’élancer : sortir du sommeil, sortir de sa demeure, se mouvoir, affirmer sa foi comme un parcours, un mouvement, un déplacement.
Foi en l’homme et Foi en Dieu. En tout cas, tel était l’invitation de la bien-aimée du Cantique des Cantiques, lancée à tous les sessionnaires des semaines que nous animions ces derniers temps.
Ne pas « se contenter »… aller vers le Grand Ouvert, l’amplitude, ce « dehors » que porte le mot existence.
A quelque page qu’on l’ouvre, l’Ecriture nous met en travail permanent de remaniement. Elle nous empoigne, nous pousse vers une autre rive, où la vie prend d’autres formes que celles d’hier et d’autres couleurs aussi.
Sous la voile de l’Ecriture, nous faisons barque commune et coup de rame après coup de rame, l’absurde se craquelle, laissant affleurer du sens renouvelé.
L’émerveillement est le point de départ de notre voyage commun. Il est le socle qui garantit à chacun le sentiment d’exister comme personne unique et singulière et qui garantit, tout aussi bien, le sentiment d’avancer ensemble dans une barque commune.
L’émerveillement, nous l’avons expérimenté au cours de tant d’années de vie professionnelle, est ce qui permet de dire "JE" et de s’adresser à autrui en toute sécurité.
Vivre : Un équilibre sans cesse remis en question, nous souffle la Bien-aimée. Il existe toujours une alternative à la résignation. Donnons-nous mutuellement d’y croire et ne cessons jamais de recomposer du sens et des formes neuves, là où tout semblait s’effriter. Créons des escales nouvelles. La barque des Ecritures nous y convie.




AUTOMNE 2023 – Le plus vieil arbre du monde


Puisque nous sommes dans les arbres, restons-y !
C’est en Tasmanie que Francis Hallé, botaniste mondialement connu et qui a eu, il y a quelques années, l’extrême modestie de venir dans notre petit bourg de Saint Palais (64) animer un ciné débat à partir d’un de ses films, a observé le plus vieil arbre du monde.
Il s’est enraciné dans le jardin botanique de Hobart et il a… 43 ooo ans. Rien de moins ! « Cet arbre a connu l’homme de la préhistoire, une époque où il y avait encore plusieurs espèces humaines. Il forme un clone de 3 kilomètres de tronc le long d’une rivière, mais c’est le même arbre, issu d’une seule graine. Le tronc initial est mort depuis longtemps. La germination de la graine d’origine date de 43 000 ans ! Il appartient à la famille des protéacées que l’on ne trouve pas en Europe. » Un arbre peut donc être immortel ? "Sans aucun doute, l’arbre de Tasmanie n’a aucune raison de mourir… à moins d’un méga feu comme celui qui a ravagé l’Australie en 2021… " explique Francis Hallé lui-même.
Alors, 43000 ans, qui dit mieux ?
In « Francis Hallé Les vies heureuses du botaniste » de Laure Dominique Agniel

RACINES, vignes de vie


Il était un arbre au bout de la branche, un arbre digne de vie
digne de chance
digne de cœur
cœur gravé, percé, transpercé
Un arbre que nul jamais ne vit
Il était des racines au bout de l’arbre
racines vignes de vie
vignes de chance
vignes de cœur
Au bout des racines il était la terre
la terre tout court
la terre toute ronde
la terre toute seule au travers du ciel
La terre.

Comment ne pas partager avec vous ce poème de Robert Desnos,
tiré de « Il était une feuille » ?
Le nom de notre association qui nous rend si sensibles aux arbres nous y oblige n’est-ce-pas ?



Août - L’OASIS d’en CALCAT


Darwin, nous ne vous apprendrons rien, fonde l’évolution biologique sur la sélection naturelle. Les plus agressifs seraient les mieux adaptés à notre monde si conflictuel. La « struggle for life » (lutte pour la vie) serait le déterminant de la sélection au profit des meilleurs… et pourtant, Darwin, dans son livre « L’entraide, un facteur de l’évolution (1902)" indique aussi que les espèces les mieux adaptées sont, non les plus agressives, mais les plus solidaires.
Prédations, agressions, compétitions donc, mais aussi, complémentarité, associations, symbiose et coopérations. L’un et l’autre à la fois.

« Finalement » conclut Edgard Morin, « toute vie comporte le besoin existentiel d’autrui qui prend forme, soit prédatrice, soit associative ou d'entraide. Il faut associer ces deux notions antinomiques et pourtant indissolublement liées : la coopération et le conflit ».
« Concorde et discorde sont père et mère de toute chose »
constatait le vieil Héraclite avant tout le monde !"

Nous revenons de chez nos frères bénédictins de l’Abbaye d’en Calcat ; et là bas, en terre chaude d’Occitanie, c’est surtout la concorde que nous trouvons et nous ne pouvons qu’être dans la gratitude. Une belle expérience de fraternité nous réunit depuis tant d’années !
En Calcat est pour nous une oasis où nous avons trouvé des frères dans l’aventure de la foi. Des frères durables, avec qui nous reposer de la grande machine calculatrice, algorithmique.

Mais laissons-les évoquer eux-mêmes ce qu’ils entendent sous ce mot si souvent galvaudé de frère. Nous reprenons ici à la lettre « F », ce qui est écrit dans l’abécédaire que l’on trouve dans chacune des chambres de leur hôtellerie :

L’homme n’accède à sa pleine humanité que par le souci du prochain. Tel est le message de toute la Bible. Dieu ne se laisse connaître que dans le registre de la fraternité. Dans le monastère, le frère est toujours présent. Il est l’horizon indépassable, l’icône de l’humanité en devenir.
La règle de Saint Benoît veut que l’on fasse précéder le nom du moine que l’on interpelle par le mot frère, pour toujours garder en mémoire quel est le fondement de la relation établie. Toute notre vie est en définitive animée par ce désir de réaliser une véritable fraternité.
La route est longue et accidentée. Le frère est aussi celui qui dévoile nos limites et nos faiblesses. Cueillir les fruits de la communion fraternelle n’est pas une partie de plaisir. Il faut souvent déchanter de nos rêves de vie idéale !
En définitive, le frère est bien celui qui permet d’aller jusqu’au bout de la route.
Il est une aide précieuse. C’est lui qui, aujourd’hui, fait entendre la question primordiale concernant cette fois toute l’humanité : « que fais-tu pour tes frères ? »


ÉTÉ 2023 – UNE VIE, UNE RENCONTRE


Puisque c’est l’été, laissons-nous dépayser.
« Une vie, une rencontre », enseigne un des moines du temple eiheiji.
Soit : Ichigo - Ichi-e
- Ichigo renvoie à la vie entière d’un être humain
- Ichi-e renvoie, quant à lui à une rencontre qui n’a lieu qu’une fois.
Cette sentence nous rappelle combien il est nécessaire d’accorder une grande importance aux rencontres que nous faisons chaque jour puisqu’elles n’auront lieu qu’une seule fois dans notre vie. La rencontre, dans le « là » d’aujourd’hui est unique. Ne la ratons pas.
Notre gîte se remplit, se vide, se remplit à nouveau : diastole, systole, les rencontres palpitent embellissant notre été, comme le votre sans doute ?

A VOS JUMELLES


Et puisque c’est encore l’été, prenons aussi le temps de renouveler notre regard.
Le caractère chinois zhen (vérité, réalité) est composé du radical « œil », car la réalité est tout ce que l’œil peut voir.
Les nôtres observent chaque jour deux magnifiques élanions blancs, rapaces inhabituels dans nos paysages. Voilà qui émerveille notre réalité.
L’émerveillé est « détailleur »… alors, détaillons :
L’élanion blanc a à peu près la taille d’un faucon crécerelle (un couple de ces derniers niche aussi cette année dans notre jardin). Il est blanc, avec un œil rouge fardé de noir. Le noir de ses épaulettes tranche et s’étend au-dessous de ses rémiges. Sa queue est courte et échancrée. Son vol battu est rapide et souple.
Sa chasse en vol sur place (il « fait le Saint Esprit » dit-on pour s’amuser) est d’une beauté inouïe. Petits rongeurs et gros insectes, cachez-vous !
Cet oiseau est volontiers crépusculaire et niche normalement en Espagne et au Portugal.
A vos jumelles donc, pour voir tout en nouveauté. Et si vous ne trouviez rien dans votre ciel ?
Alors, écoutons Malevitch et suivons son conseil :
« Je vais vous imposer de voir quelque chose, là où justement il n’y avait rien ».
Rassurer-vous, vos jumelles sont à la solde de ce peintre : elles vous imposeront de voir quelque chose… pour votre plus grande joie !

DU POEME AUSSI VITAL QUE L’EAU


L’été, les jours sont longs et les choses n’ont plus besoin d’aller aussi vite.
C’est l’époque de l’année où nous pouvons travailler à avoir un rapport moins maladif au temps. Avec l’été, réveillons notre âme chinoise. Car en Chine, on ne se représente pas le temps comme une flèche qui vise une cible. Pas plus qu’on ne se le représente comme un sablier qui mesure l’écoulement des minutes.
L’image de l’eau convient beaucoup mieux à nos frères d’Asie.
L’eau qui nous porte, nous enveloppe, nous rafraichit et coule dans nos projets, les assouplissant.
De l’eau, il y en a chez nous, en Pays Basque, mais il y en a aussi en Bretagne, destination privilégiée des vacanciers cet été.
Ecoutons les bretons, si souvent poètes, sans doute à cause de l’eau, à cause des va et vient de la mer, à cause des vents qui permettent aux mots de s’envoler des poitrines.
« La poésie ne répond pas aux questions, mais elle ne nous laisse pas tomber seuls dans nos questions. Le poème dénoue. Le poème augmente la vision et dilate le regard. Il est aussi vital que l’eau » écrit Yvon le Men.
A vos poèmes. Lancez-vous ! Guillevic, un autre poète breton vous épaulera dans cette haute aventure :
« Nulle part comme à Carnac
Le ciel n’est à la terre
Ne fait monde avec elle
Pour former comme un lien
Plus lointain de tout
Et qui s’avance au-dessous du temps. »

S’avancer au-dessous du temps et jouer avec les chats, beau programme pour août qui arrive.

ATTENTION où nous RANGEONS NOTRE MEMOIRE !


A Yvon le Men il faut savoir y revenir :
"J’ai dans la pièce à côté du salon une collection de galets magnifiques.
- Comment fais-tu pour trouver ces galets ? me demandait un enfant Je lui ai répondu
- Ce sont eux qui me voient. »

Ecrit-il cela en écho au poète Bashô qui, à la fin de l’été 1684, âgé de 40 ans, entreprend son premier pèlerinage poétique ? Il écrit alors dans son journal :
"Dans ce qu’on voit rien qui ne soit fleur
Dans ce qu’on ressent, rien qui ne soit lune.
Quand on ignore la fleur on est pareil à un barbare.
Quand dans le cœur on ne ressent pas la lune, on est de la même espèce que la bête.
Pour chasser le barbare, pour éloigner la bête, il faut s’accorder à la nature créatrice.
Mon corps comme une feuille dans le vent est promis à un destin imprévisible. »

Alors, nés pour la légèreté ? Sous les pluies de novembre, il faudra s’en souvenir ! Mais attention où nous rangeons notre mémoire…



Noël 2022


Noël approche


Soignons nos racines d'en haut.
Cela peut suffire en cette époque où la simplicité est de mise.

Encore Noël


Noël ? Une lézarde dans la nuit des absurdes ?
Faufilons-nous dans cette infime craquelure.

Irruption de bleu


"On en voit le matin
qui ne saluent pas
Cette irruption de bleu" proteste le poète breton Guillevic.
Quand l'hiver s'amuse à mettre des majuscules à ses nuages, elle est d'autant plus belle cette irruption de bleu.


Ainzina !


Une année finit
Une année arrive
"On avance peu à peu, comme un colporteur, d'une aube à l'autre".
P. Jaccottet



PRINTEMPS 2022 - LES ARBRES QUI FONT PENSER


L’arbre qui pense
Les pieds dans sa grille
A quoi pense-t-il ?
Oh ça oh mais ça oh mais ça à quoi pense-t-il ?
Le chien qui pense
La patte en l’air
Que pense-t-il ?
Oh ça oh mais ça oh mais ça à quoi pense-t-il ?
Le pavé qui pense
Le ventre poli de pas
Que pense-t-il ?
Oh ça oh mais ça oh mais ça à quoi pense-t-il ?
Ciel, toits et nuages
Voyez-moi
Là tout en bas
Qui marche
Et que pense à l’arbre qui pense
Au chien au pavé
Oh ça oh mais à quoi pensent-ils donc
A quoi pensent-ils donc ?
(R. Queneau)

Chaque année à Pessac, en bordure des pavés polis de Bordeaux, nous honorons notre rendez-vous avec des arbres magnifiques qui nous font penser, dans le parc de Fontaudin, chez les sœurs de Saint Joseph.
Amies de Dordogne, de la grande cité bordelaise ou de ses environs, amie de Paris et religieuses du lieu, nous nous sommes retrouvées ces 14 et 15 mai au cœur de ce grand parc, pour parler de mort et de resurgissement.
Ces dernières années, certains des plus grands arbres sont tombés, entrainés par la tempête et la loi de la pesanteur. Mais leurs souches sont restées et ce fut l’occasion pour elles, de s’enfoncer toujours plus profondément en terre pour rejaillir, tout neufs, tout jeunes.
"Que le goût de l’arbre entier soit le même que celui de son fruit » nous rappelle le Talmud.
Savoir que l’objectif après lequel nous courons a bon goût est une excellente chose, mais pourquoi ne pas offrir la même qualité d’attention aux moyens que nous mettons en place pour atteindre nos objectifs ? Pourquoi repousser le sentiment de satisfaction, seulement à la fin du processus ?
Que le goût du fruit soit présent dès le début de nos journées. Que tout soit saveur, même l’écorce épaissie des choses. N’attendons pas l’automne !
Abracadabrarbre !


LES ARBRES-MOINES


Samedi 2 et dimanche 3 avril, les sœurs de Nevers nous ont accueillis dans un quartier de Montpellier encore habité par d’étonnants parcs. La stupéfaction fut au rendez-vous : pas un bruit, même en cœur d’une si grande ville ! Un beau silence donc, pour accueillir la Parole biblique qui vient nous chercher. Mais avec les dix sessionnaires, nous avons pu aussi nous mettre à l’écoute de la vieille langue des grands arbres qui parle à la fois d’élan et d’endurance. C’était un cadeau imprévu.

Savez-vous que dans le nord de la Thaïlande, certains arbres reçoivent l’ordination des moines ?
Quand les parcelles entourant les villages sont trop exploitées, les habitants, persuadés que le bois est bien plus qu’une ressource monétaire, font venir un des supérieurs des temples de leur région pour choisir les arbres les plus vieux et les entourer de la robe safran. Celle des moines bien sûr.
Plus personne n’ose alors porter la hache sur le bois vivant qui a reçu l’ordination.
Les sœurs de Nevers veillent, elles aussi, précieusement sur leurs arbres, même ou surtout en plein coeur de métropole. Sans eux, comment pourrions-nous vivre ?
« Qui sait beaucoup
Aime beaucoup.
Qui aime beaucoup
Sait beaucoup. »

Asko dekienak
Asko maite du
Asko maite du
Asko daki. (J.P. Artze)



DECOUDRE et RECOUDRE LES MOTS


Continuons à remonter le temps.
Le 26 mars, une équipe de la fraternité de Charles de Foucauld de Tarnos (40), est venue s’enfoncer en Pays Basque intérieur, pour découdre les mots et les recoudre différemment.
* Quelles questions nous arrivent d’en haut ?
* Que faisons-nous de ce qui n’a pas de réponse ?
* Nous supportons-nous, au quotidien, comme mystère ?
* Que faire de nos paroles pas encore consistantes ?
* Comment faire de la lumière avec ce qui est sable et poussière ?
* Se trouve-t-on en s’abandonnant à la Parole vraie ?
* Nos cris sont-ils encore de la vie par-delà ce qui est ?
Les questions nous poussent et nous travaillent au corps. Une terre plus large nous espère. Nous allons, nous venons avec nos creux, avec nos pleins, avec nos ombres et nos vigueurs, pas à pas, jour à jour.
La marche est réponse.
De tout cela, il fut question et Francine Carillo n’était jamais très loin de notre réflexion.
Merci à ces nouveaux visages d’être venus jusqu’à cet humble atelier d’Elordoï au quartier Gibraltar.
« La surface la plus passionnante de la terre, c’est pour nous, le visage humain » Lichtenberg
Vous nous avez ainsi bel et bien passionnées.



NOVEMBRE 2021 - NUL NE SAISIT LE VENT


Le dernier livre de Marion est paru, édité par la très soigneuse édition du poète Jean Lavoué : L'enfance des arbres.
Voici ce qu"écrit un autre poète breton, Jean-Pierre Boulic, à propos de ce livre :

« Nul ne saisit le vent », celui qui pousse les nuages, emportant avec eux la tristesse qui a pu noircir nos vies. Bien sûr, aussi, celui qui laisse paraître en silence, au bout de l’aube, le secret lumineux des petites choses qui édifient la vie, quand le verbe « être » nous apprend et nous conduit à chaque instant sur le chemin décapant d’un juste effacement…
C’est ce qui se révèle à la lecture de ce livre original, attachant voire percutant de Marion d’Elissagaray, au fond une très judicieuse réponse à une des questions posées alentour d’une page : « Peut-on compter sur l’insolence des femmes ? » Oui, sans réserve.
Ici, une mère fait le récit de l’expérience – à nulle autre pareille – de la vie de son fils jeune dont la mort a fait mourir la mort « même si cela ne se voit pas encore », dit-elle ; de même qu’elle a auparavant précisé que cet événement difficile à comprendre va demeurer encore et toujours à interpréter.
Dans ce récit allégorique, l’auteur(e) a bien pour projet – et réussite – de faire parler les mots et donner à entendre que, contrairement à ce que l’on pourrait croire, le vent de l’espérance ne s’est pas enfui : « La victoire de la vie est chose définitive pour vous tous. » L’attente et la veille le permettent. Si « les rites vieillissent. Pas les mystères ni les poèmes » alors, dans son permanent exode, le temps des humains à nouveau, comme l’océan infiniment, relève et déploie des rouleaux d’Écriture et de désir, un langage en quête de justice et de fraternité, une parole qui apporte un cinglant camouflet aux sarcasmes qui ne cessent de gonfler les pouvoirs et foules avides de violence.
Le livre s’adresse à quiconque. Il révèle que les terres du cœur ont un à-venir grâce au bois de l’arbre où mûrit le fruit d’une Parole unique, celle de l’amour : « Aimer ne plie pas drames et souffrances à ses ordres. Car Aimer n’a pas d’ordre. Aimer est déraison. La déraison sera donc votre métier, votre rôle sur terre, votre vocation. » Quelle magnifique raison d’être !
Voilà par sa mère le récit à nu de la Passion du Fils de Dieu. Un livre tonique, gorgé du vent du large. À contempler aussi, grâce aux dessins et encres de l’auteur.
Saluons au passage le profond travail de découverte, depuis sa création, de la maison d’édition L’enfance des arbres.

Pour en savoir plus : présentation, prix et conditions de commande, rendez-vous sur la page Presse et Publications



ÉTÉ 2021 – LE LUXE PUR D'ÊTRE MOZART


Pascal Quinard dans L’homme aux trois lettres nous raconte que Mozart composait au lit. Il travaillait dans le silence du matin jusqu’à 10 heures. Et sa journée était faite !
Alors, il se levait, s’apprêtait, se frisait, se poudrait.
Sa femme Constance dormait encore, paraît-il. Il lui laissait un mot : Je souhaite que tu aies bien dormi, ma chérie. Évite toute occasion de chagrin au cours de la journée. Je ne vois rien de si doux que ta joue ».
Les mois passent, les années passent et nous, pour notre plus grand malheur, nous oublions d’être Mozart… et d’avoir fini à 10 heures, l’incontournable, pour enfin commencer les petites choses si légères et si bonnes qui font que la vie est la vie. Rien de moins.
Heureusement, il y a les vacances : le luxe pur d’être Mozart !



JUILLET 2021 – SUPPLIQUE POUR LES ABELS DU PAYS BASQUE


L’été est arrivé…
Rien n’est aussi simple qu’une feuille de papier pour le dire. Et rien n’est aussi compliqué que le nombre de touristes qui déferlent dans notre région. Encore plus que l’année dernière qui était pourtant déjà explosive !
Entretiendront-ils une connivence avec les torrents, les lacs, les troupeaux, les dunes, le sable, les montagnes, le vent, le sel… et les locaux ?
Voudront-ils respecter, plus que par le passé, le travail de nos bergers ?
Je sais : il est mal venu de faire des généralités. Tous les touristes n’ont pas à refaire leur âme de touriste !
Certains (mais trop rares en nombre, avouons-le) savent se glisser dans nos paysages avec une grande délicatesse et nous les en remercions chaleureusement. Mais à cause des autres, n’est-ce pas le moment d’écouter l’invitation du grand penseur juif André Néher ?
Il nous disait en effet :
« Mais vous, les enracinés, que faites-vous de votre mission de sensibilité ? Comment véhiculez-vous la sève de l’attention et du respect ? Et que dites-vous de votre mission de décalage ? Marquez-vous une autre heure ? Celle de la dignité de tous, homme de la terre ou homme de la ville ? Et enfin, qu’en est-il de votre « mission d’avertissement ? »
Demain peut-être. Peut-être. Un demain paisible, grâce à tous.
Et A. Néher de nous rappeler encore que Dieu avait d’abord créé un sol : une Adama… et puis il avait ensuite souhaité que l’homme Adam, sache rester en partie un fragment de cette Adama. Mais Caïn a transmuté le sol en ville. Il a rompu le lien originaire en recouvrant la terre d’un gigantesque réseau urbain. Et puis Caïn, du moins les Caïns modernes, ont été pris de nostalgie. Et on a nommé cela : les vacances ! Le désir des grands espaces. Sauront-ils, ces Caïns du XXIe siècle, faire mentir le mythe et écouter tous les Abel-bergers de chez nous qui n’ont jamais rompu ce lien devenu si fragile et si délicat avec la terre ?
Et soyons bien concret : cela commence par éviter de garer sa voiture devant les accès aux enclos, absolument nécessaires en été pour soigner et compter les bêtes. Et bien sûr, contourner ces mêmes troupeaux pour ne pas risquer de disperser les bêtes. Car Abel ne peut pas se payer le luxe de passer une grande partie de sa semaine à galoper dans la montagne à la recherche des brebis perdues. Abel n’est pas dans le temps des vacances.
Qui s’en souviendra à l’heure où il faudra garer sa voiture 2 kilomètres plus bas que prévu au pied d’une randonnée ?



NOVEMBRE 2020 – SPELEOLOGIE LINGUISTIQUE


Continuons ce que le rabbin appelle la spéléologie linguistique, puisque le mot CONFINEMENT demeure et demeurera dans l’air du temps.
En hébreu, CONFINEMENT se dit BIDOUD. Le sens originel de ce mot signifie LIN ; et ce LIN a donné LINGE ; et le sens dérivé est le plus classique : SEUL, ISOLE.
Alors comment relier « lin » à « isolement » ? Voilà de quoi faire travailler les neurones.
A l’époque d’Abraham, le lin servait à tisser des vêtements. Or, comme chacun sait, le vêtement isole, protège. «Habit» donnera d’ailleurs «habitation » : le lieu qui nous protège. Le lin servait en Mésopotamie et en Egypte à isoler les maisons, nous apprend aussi le Rabbin. Comme quoi, nos inventions les plus récentes (l’isolation au chanvre et lin) ne sont pas aussi neuves qu’on le croyait.
La racine du mot « bidoud » (ou confinement, ou lin) est BAD : B ou BETH signifiant maison et D ou DALETH : porte. L’isolement n’est donc concevable que si notre chez soi a une porte, qui se ferme et qui s’ouvre !
Le confinement est ainsi à la fois une isolation protectrice et une ouverture sur l’autre.
La relation à l’autre subsiste. Nous ne devrions donc pas tomber en désolation. Tenons-nous le pour dit. Et le rabbin de conclure « en anglais, confinement signifie accouchement. » preuve s’il en faut qu’il y a des confinements féconds !



OCTOBRE 2020 – DES MAUX au MOT


Travailler sur les mots, permet, c’est bien connu, de se confronter efficacement aux maux.
Alors n’hésitons plus : grâce à toute une recherche effectuée par le rabbin Marc-Alain OUAKNIN, le mot CONFINEMENT va nous livrer son trésor.
Il va sans dire que, naturellement, ce mot a une connotation plutôt déprimante et renvoie immédiatement à ENFERMEMENT. Pas le droit de mettre le nez dehors. Nez qui est, de toute façon, emprisonné lui-même sous un masque.
Et pourtant l’origine médiévale de ce mot renvoie aux CONFINS, c’est-à-dire, le bout du bout du champ, là où passe la frontière avec celui du voisin. Frontière superbement ignorée par les taupes et les chevreuils.
Et le rabbin de commenter : « Devant un confinement on découvre paradoxalement ses voisins. C’est une occasion rare de se soucier des personnes géographiquement proches mais qui étaient socialement lointaines. Etonnamment, le confinement est la rencontre avec le voisin ! Autrement dit, la fin de mon lieu propre et le début de celui de l’autre ».
Finalement, ce mot-là a aussi du bon ! Tenons-nous le pour dit.



OCTOBRE 2020 – L’ART du « RATER/REBONDIR »



Crise sanitaire ou pas, une semaine devant sept stagiaires éducateurs-éducatrices ou infirmiers-infirmières en psychiatrie, sont venus travailler d’arrache-pied, dans le cadre de la formation professionnelle, au GERFI à la Rochelle.
C’est toujours avec le même émerveillement que nous regardons ces apprentis studieux découvrir comment alléger la densité d’une boule de terre, jusqu’à devenir des virtuoses des silhouettes. Encore qu’avant ce grand saut, il leur a fallu beaucoup oser rater
Voir ce qui ne va pas et me déçoit tout en écoutant sur quelle piste cette maladresse va me lancer, est un des réflexes majeurs à acquérir. C’est bien le potier qui est mis à l’épreuve et non ses œuvres.
Est-ce à cause de leur métier ? Les éducateurs et autres personnes travaillant dans les professions du soin, traversent cet art du rater-rebondir avec brio, ce qui nous enchante.
Anaxogore, l’un des maîtres de Socrate écrivait dès le Ve siècle avant notre ère : « l’homme pense parce qu’il a une main ».
Ainsi la pensée fait la main, la main fait la pensée et c’est cette articulation des deux qui nous permet de rebondir en permanence.
Ainsi, depuis tant d’années, tant d’éducateurs nous enseignent à leur insu, la voie du rebond. Notre gratitude va vers eux en ces temps d’incertitude.



SEPTEMBRE 2020 - PANIER de FIGUES



La saison des figues bat son plein.
Ronde de Bordeaux, Grise Saint Jean, Grosse longue verte, sultane, goutte d’or, Marseillaise, Grise ronde à chair rose, Petite grise, Madeleine des deux saisons… en plus d’être juteuses et fondantes, les figues sont poétiques !
Une quarantaine de variétés s’offrent à notre convoitise. Plantés en terrain pauvre, nos figuiers adoptent une forme buissonnante qui a l’avantage de mettre les fruits à portée de mains !
Mais il y a figue et figue… seuls les figuiers femelles sont productifs. Chance ! Les nôtres le sont.
« Que l’on me prive de tout ce que l’on voudra, si ce n’est de café et de figues » s’est écrié Paul Valéry et Francis Ponge a célébré ce fruit ainsi : « Pauvre gourde, comme une église de campagne, à la fois rustique et baroque, où le portail ouvert, la remplissant toute, luit comme un autel scintillant ».
Il faut dire qu’à la première pluie, la figue mûre se fend en croix et quoi de plus inspirant pour un poète ? Allons, le temps presse, il faut nous préparer à l’épopée des confitures. On reprendra la poésie après.



SEPTEMBRE 2020 - FLAMMES et LUMIERE



« Perdre la face », « ne plus avoir figure humaine », etc. nombre d’expressions disent l’importance du visage. Nous sommes reconnus et aimés par notre visage. Nous naissons avec, nous apprenons à lire en regardant l’alphabet des nez, des bouches et des sourcils et nous mourrons avec.
Entre temps, nous vivons avec et il nous expose. Car ce qui permet au visage d’être un visage c’est bien sa nudité.
« La peau du visage est celle qui reste la plus nue, la plus dénuée. » écrivait Levinas.
Il y a dans un visage une pauvreté essentielle mais aujourd’hui, nous ne voyons plus que les yeux. Tout le reste est masqué.
Cependant, si « dans le regard des jeunes on voit de la flamme et dans le regard des vieux, on voit de la lumière » comme l’affirme le grand Victor Hugo, alors au moins obstinons-nous à admirer avec une attention sans faille toutes ces flammes et lumières qui nous nous entourent et nous réchauffent !




AOUT 2020 - Le BON ZELE


Moïse s’est élancé dans une course dont il ne savait pas le chemin. Il doit l’inventer à chaque pas.
Nous étions quinze en l’abbaye d’En Calcat pour vivre au rythme de ce prophète pendant une semaine. Les moines, une fois encore n’ont pas manqué de communiquer à chacun l’énergie nécessaire pour s’enfoncer dans le silence, la créativité, la réflexion, la prière et bien sûr l’échange.
Aller de pourquoi en pourquoi n’est pas toujours reposant. Mais personne n’était venu pour se reposer. Chacun était là pour vibrer avec Moïse mais aussi, avec les moindres gestes de ses mains et dans tous les plis de son intelligence.
La ferveur était là : le « bon zèle » dont parle Saint Benoît et qui met en route vers sa propre transformation. La foi sous toutes ses formes est toujours un bond.
La vie de Moïse nous a indubitablement aidés à entretenir cet état d’esprit.



C’en est TROP !



Par les temps qui courent, la liste des reproches que l’on fait aux jeunes s’allonge… s’allonge… s’allonge.
Mais en réalité, ne leur demande-t-on pas d’être vieux avant l’heure ?
Si tel était le cas, alors heureux celui qui a su être vieux dans sa jeunesse car sûrement saura-t-il être jeune dans sa vieillesse !




VISIBLE - INVISIBLE



Depuis mars c’est de masques et de visages dont il faudrait parler.
Nulle part, dans aucune tradition des arts archaïques, le sculpteur de masques ne fait un croquis préparatoire. Il attaque direct. « Sa main voie ». Il n’utilise pas de modèle. Le masque servira généralement à aider les vivants à communiquer avec les morts et aussi avec les dieux.
Mais qu’en est-il de nos masques chirurgicaux ? Une aide à la communication ? Trahissent-ils ou préservent-ils nos visages ? Nous rappellent-ils que nous sommes les uns pour les autres des mystères irréductibles ? Depuis mars, un visage se forme sur l’ancien visage. Un visage sans bouche, sans nez, sans expression autre que l’éclat des yeux.
Faut-il sourire doucement devant l’apparition de tous ces nouveaux venus ou être exaspérés parce que ce n’est plus soi, ce n’est pas mol, ce n’est plus nous et qu’on se sent déraciné de notre humanité ?



JUILLET – Le BON VIEUX REEL



En juillet, nous avons été heureuses d’accueillir à nouveau le groupe de jeunes étudiantes de Tarnos, déjà venu l’année dernière.
Leur désir était de prendre le temps de relire l’année qui venait de s’écouler et particulièrement la période de confinement.
Internet est le milieu de vie de cette jeune génération. Chacun d’entre eux baigne dans ce monde digital et virtuel depuis le plu jeune âge. Le langage d’images et de son, de vidéos, de musique n’a pas de secret pour eux. Ils nagent sans difficulté dans le monde du « co » : covoiturage, colocation, travail collaboratif… des nouvelles formes de vie sociale souples, adaptables et fluides, jaillissent.
ET POURTANT !
A notre grande surprise nous avons découvert des jeunes qui avaient aussi envie de revenir au bon vieux réel. Le télé-enseignement, certes pratique, ne les comblait pas et loin s’en faut. Le contact avec un « vrai » vis-à-vis leur a beaucoup manqué et ils craignaient une généralisation, à bas bruit, de ce mode d’enseignement moins coûteux, mais qui efface la profondeur de la relation. Des questions ont jailli au cours des échanges et pas des moindres !
Nous en offrons quelques unes à votre sagacité :
- Et si on recommençait à prendre son temps, à relire ses emails, à se mettre à la place du destinataire, à laisser décanter ?
- Et si on se posait systématiquement la question de l’auditoire : le message est-il pour tout le monde ? Peut –on encore prendre le temps « d’écrire » pour une seule personne ?
- Et si nous interrogions notre habitude de faire plusieurs choses à la fois, ce que le monde numérique favorise ?
- Qu’en est-il de notre fausse attention ? De la qualité de notre présence à l’autre ? De l’intérêt vital de ce que nous partageons ? Puis-je me dire : "ceci mais pas cela" ?
Les jeunes nous appellent à interroger sérieusement la conversion numérique que nous sommes en train de vivre en nous laissant glisser dedans, sans une réflexion consistante et rigoureuse à l’appui.
Alors… ne nous dérobons pas !



MARS 2020 - DIMANCHE LES ELECTIONS


Nous nous contenterons d’une phrase pour les évoquer. Elle est de Balzac :
J’appartiens à ce parti d’opposition qui s’appelle LA VIE



FEVRIER 2020 - D’ABORD IL N’Y A PAS


Entrée, pour les chrétiens, dans le carême : 40 jours pour découvrir combien d’abord… il n’y a pas.
A nous d’aimer à vide, sans voir.
Et le Coran de préciser : « Car Dieu ne donne à ses serviteurs pour le connaître, que leur ignorance de lui ».
Et Karima Berger, islamologue, de commenter : « Mais il faut y aller ! »
Safar,
c’est ainsi que la langue arabe nomme le voyage ou dévoilement. Car par le voyage, l’être se dévoile à lui-même.
Alors, voyageons en Carêmes ; explorons les confins de notre quotidien ; enlevons nos voiles en trop et gardons les autres. On n’allume pas un brasier avec des grosses bûches, mais avec de toutes petites brindilles.
Ce que le philosophe Paul Ricoeur traduira ainsi : « Convertissons-nous à l’en-deçà ».



FEVRIER 2020 – DEMEURER LONGTEMPS AU FOND D’UN TEXTE


Les 12 participantes du week-end de Pessac qui s’est déroulé chez les Sœurs de Saint Joseph, étaient venues pour pratiquer une sorte d’arrêt. Et mieux encore, pour transformer cette action de s’arrêter en ressource.
Il s’agissait de créer une détente au beau milieu des forces en conflit dans notre quotidien, tout en restant attentif à ce qui va se passer.
Cet arrêt crée de l’espace et les forces qui nous habitent peuvent alors se recombiner, se réunifier.
Ensemble nous laissons l’Evangile qui nous a rassemblées, faire son travail en lui donnant le temps qui lui est nécessaire. Nous demeurons donc longtemps au fond d’un texte. Pourquoi ? Pour replonger nos vies dans leurs cohérences respectives et donc dans leurs saveurs.
Cette saveur, unique à chacune, suscite alors une merveilleuse profondeur dans l’interprétation travaillée en communauté d’un week-end.
Merci à chacune pour cette lecture à plusieurs qui, protestantes, catholiques, chercheuses de vérité, qui nous convie à toujours plus oser notre liberté !



DECEMBRE 2019 – FAIRE PREUVE de… TACT !


L’alerte rouge tempête, les inondations qui ont transformé la route en lac incongru, ne nous ont pourtant pas empêchées de nous rendre au Lycée professionnel du Guichot niché en plein cœur du quartier de Bayonne, férocement piétonnier pour qui a plusieurs centaines de kilos de matériel à décharger et à recharger le soir sous la pluie !
Un premier groupe de 15 jeunes de terminale Gestion-administration joua le jeu de l’évangile et de l’argile. Nous avions choisi la parabole du Bon Samaritain, cet homme qui ose engager son cœur certes, mais aussi son toucher pour soigner un blessé laissé pour mort au bord de la route. Ce qui n’est pas si simple, comme le montrent le lévite et le prêtre de l’histoire qui passent leur chemin mais aussi les paires de gants en plastique qu’il fallut chercher en urgence tant « Beurk ! L’argile c’est sale ».
Nous le savions : mieux vaut s’apprivoiser en douceur et composer avec les résistances, plutôt qu’entrer dans une épreuve de force du style : « mais non ! Tu vas voir ! Rien de sale dans la terre ». D’abord se réassurer intérieurement avec des gants et puis, pourquoi pas les enlever car ces bouts de plastique qui collent aux doigts ne sont ni agréables ni pratiques.
Cette peur de toucher à laquelle se sont affrontés nombre de ces jeunes qui ne sont plus dans le circuit d’une scolarité dite classique, nous rappelle combien le Toucher peut être un outil, comme il peut être une arme. Nous pourrions retrouver facilement les effets néfastes et persistants de touchers réticents quand il ne devrait pas l’être, agressifs, non respectueux, voire violents ou absents.
Bien des jeunes paient, sans en être conscients, des dettes en contact corporel, surtout dans une société qui se dématérialise de plus en plus.
La peau est l’organe le plus étendu et le plus lourd du corps : 2 m² de surface et 4 kg de poids. Que chacun puisse se la réapproprier fait désormais partie de notre travail.
Le toucher fait entrer en relation. La peau de l’un rencontre la peau de l’autre. Cela suppose le mouvement d’un individu vers un autre.
Le toucher est donc une dynamique de rapprochement physique. Les enjeux sont alors immenses et le deviendront de plus en plus. A nous d’avoir du tact pour que le contact s’établisse. Le tact c’est surtout savoir apprécier le moment opportun et le contenu adéquat de ce qu’on va dire, permettre, accompagner et laisser dire et faire…
Sachez-le : les mains de ces jeunes ont finalement créé des merveilles inattendues.



Suite... PETIT VOYAGE autour du verbe TOUCHER


Le second groupe de cet après-midi passé au Guichot fut constitué de 8 jeunes filles en formation d’éthiciennes.
Pour elles, le toucher n’était plus un problème. Elles avaient même eu plusieurs fois, l’occasion au cours de leurs études, de pratiquer des soins dans les maisons de retraite et pour les personnes de la rue.
Mais revenons à l’étymologie du verte TOUCHER.
A l’époque classique, toucher quelqu’un ou quelque chose signifiait « s’attaquer à », autrement dit, maltraiter. Toucher signifiait aussi palper et l’institution de se toucher la main en signe de bonjour apparaît au XVe siècle puis, en signe d’accord au XVIe siècle.
A la fin du XVIIe arrive la dimension affective du verbe toucher : émouvoir, attendrir, avoir du tact, et même « faire une touche ».
Les rois de France, jusqu’au XVIIe siècle avaient le pouvoir de guérir les écrouelles ou scrofules (c.a.d.. les ganglions infectés par la tuberculose) en les touchant. Louis XIV prononçait même ces mots « le Roi te touche, Dieu te guérit ».
Les jeunes filles du Guichot, certes ne guérissent pas telles des dermatologues, mais sont pourtant bien ces reines qui contribuent à soigner le sentiment d’indignité des uns et des autres, parmi les plus défavorisés d’entre nous. Combien nous nous réjouissons de cela et nous ne les encouragerons jamais assez !



NOVEMBRE 2019 – LA PLUIE FROIDE que l’on PREND entre les MAINS


Ça y est : le blanc nouveau est apparu sur les sommets des Pyrénées.
Les vents vont bien ! Les palombes passent et les chasseurs les appellent : « mes filles, mes cocottes, mes petites », rien ni personne ne peut les empêcher de vivre un mois et demi dans leurs cabanes. Si les vols se font attendre, on compensera alors avec le passage des calories.
Et en attendant, la neige tombe sur les hauteurs : xuê l’appelle-t-on en chinois.
Comme la pluie, la neige tombe du ciel mais elle a une particularité qui enchante les enfants : on peut prendre ses « gouttes » dans les mains et en faire des boules !
C’est pourquoi l’idéogramme « neige » : xuê, s’écrit en utilisant celui de la pluie, plus le signe de la main.
La neige n’est-elle pas, de fait, de la pluie froide que l’on prend entre les mains ?



OCTOBRE 2019 – LES EPHEMERES


« Les éphémères », ainsi les grecs nommaient-ils les hommes, et l’automne se charge de nous le rappeler.
Le temps est la marque de notre impuissance. On ne l’arrêtera pas.
…Les feuilles se laissent arracher l’une après l’autre et voyagent sur le vent, avant de retourner à la terre et de se décomposer.
…Les châtaignes et les noix tombent, les palombes et les grues migrent sans laisser de trace dans le ciel.
…La montagne se transforme ; à l’horizon elle devient blanche.
…Barbotine notre chatte, entre et sort par la fenêtre en permanence ouverte. La nuit, elle accompagne, avec délice, les clairs de lune, mais bientôt il sera nécessaire de fermer les fenêtres.
L’automne nous le rappelle : la destruction d’une forme en vivifie une autre ; les transformations sont la continuité de la vie. La merveille, c’est le renouvellement constant au fil des jours. Mais ce que la nature arrive à faire sans trop de problèmes est plus difficile pour nous, avouons-le !
"Trouver le bonheur en vivant de riz grossier et d’eau et en dormant avec son bras replié pour oreiller" ? (Confucius) ainsi laisserait-on de la place vide pour que les changements s’opèrent ?
Heu… mais si l’on y réfléchit bien : à quoi sert de manger du riz grossier à l’eau quand les jardins offrent citrouilles et potimarrons en quantité et quand le jus de pommes nouveau est arrivé ?
"N’en jamais revenir d’être au monde et de voir. L'étonnement est la clé de voûte de l’âme" rappelle Christian Bobin… alors, que l’automne nous émerveille par ses saveurs et ses couleurs !




AOUT 2019 – POURQUOI LES CLOWNS ONT LE NEZ ROUGE ?


De la même racine indoeuropéenne host, dérivent les mots hospitalité et hostilité.
L’étranger qui arrive est un mystère. Qui sera-t-il ? Frère ou ennemi ?
La bienveillance à l’égard de l’hôte a donc probablement été dictée à l’origine par le souci de conjurer cette question.
Il se trouve que nous avons de la chance. Tant au gîte qu’à la maison, seules les personnes fraternelles et chaleureuses sont venues depuis juin et viendront encore jusqu’en septembre.
Evoquons par exemple Valérie et son mari Marc. Valérie est clown, art thérapeute, éducatrice ; elle écrit et illustre des livres pour enfants et elle est, de surcroît alsacienne parlant alsacien !
En prenant au sérieux notre désir de légèreté, en partant en guerre contre l’esprit de pesanteur, Valérie nous propose de rester fidèle à notre enfance ou d’au moins retrouver l’homo ludens qui fait partie intégrante de notre identité. Alors, peu de chose, moins que rien, suffit à nous émerveiller.
Pourquoi aujourd’hui c’est pas demain ?
Pourquoi l’étoile d’araignée elle est dans le jardin ?
Pourquoi les clowns ont le nez rouge ?

Voilà le type de questions que Valérie tente de résoudre.
Peut-être que les clowns ont le nez rouge parce qu’une petite coccinelle grimpe et monte se poser sur ce doux promontoire ?
Pour en savoir plus, lisez « Pourquoi les clowns ont le nez rouge ? » paru aux Editions JM à Mulhouse ou encore « abécéd’rêve » – de Valérie MULLER jdmeditions@wanadoo.fr
Quand on n’a plus assez de musique en soi pour faire danser la vie, il est urgent de découvrir Valérie et Marc, la vie se remettra irrésistiblement à danser.
Bienvenue à eux en septembre au gîte d’Elordoï.



AOUT 2019 – UN JOUR DE PLUS NE FAIT PAS POURRIR L’ELEPHANT


Non sans un zeste d’humour, nous pourrions dire que la vieillesse est le moment de la vie intérieure inévitable !
Si l’on ne peut plus courir ici et là parce que les jambes flanchent, le prodige c’est qu’il reste la vie intérieure à vivre justement !
Cette semaine de rencontres avec les Filles de la Charité (cf JUIN 2019) fut aussi l’occasion de chercher ensemble comment métamorphoser tous nos appauvrissements en richesse.
Malheureusement –et on n’étonnera personne en disant cela- : point de réponse universelle et simple, sinon celle de continuer à rester réceptif.
« Tandis que le tissu de ma vie s’use, que la trame comme la chaîne accusent des tiraillements et s’effilochent, je découvre que l’étoffe, peu à peu, imperceptiblement laisse passer la lumière ... »
Ainsi y a-t-il un don des aînés : on peut consentir à la fragilité et aux limites et vivre pourtant en « colporteur de lumière ». Idéaliste ? Oui et non.
Est-ce à cause d’un heureux changement de date ? En tout cas la session sur le combat de Jacob que nous avons ensuite animée à l’Abbaye d’En Calcat au mois d’août à réuni cette année un bon groupe intergénérationnel.
Ce fut l’occasion d’échanges fructueux entre celles et ceux qui portaient l’éclat de l’expérience et d’autres le dynamisme de la jeunesse.
Le devant nous appelle tous. De manière singulière, nous nous préparons à devenir radicalement neufs, refondus jusqu’à la racine. on n’apprend pas son chemin au vieux gorille ? Eh bien si justement. Les jeunes sont là pour entretenir notre esprit d’admiration, notre élan créatif, notre curiosité… et notre idéalisme… et ils y arrivent à merveille.
Lorsque le père de Marion Muller Colard reçut la médaille du mérite, elle fit un petit discours qui commençait ainsi :
- Mon père a une grande qualité : c’est un idéaliste mais également un défaut majeur :
- C’est un idéaliste.
Alors, sous l’influence des jeunes, cultivons sans réserve nous aussi notre grande qualité et notre grand défaut !
Le pain ne manque pas sur la planche.



JUILLET 2019 – ALLEGRO


L’été, saison de l’hospitalité « la vie se remet irrésistiblement à danser » (Gracq).
On craint parfois que la présence de l’autre encombre notre maison, mais non, elle l’agrandit !
Dans le sud du Togo, on appelle l’hôte : le désiré (amedzro) ou l’homme qui nous fera honneur s’il se présente.
La famille de Baptiste et Estelle, arrivée dans notre jardin en van, nous a offert l’immense plaisir d’une petite coupure en pleine été. Alors, à nous les heures de tourisme : qu’il est bon de visiter ce qui existe contre chez nous et que nous ignorons encore ! A nous les sommets modestes par jour de canicule avec un enfant dans le dos et des petites jambes de 4 ans qui suivent vaillamment, toutes montagnardes qu’elles fussent, puisque Baptiste, Estelle, Noé et Simon nous venaient de l’Isère. A nous aussi les parties endiablées de jeu de Piratatak pour se remettre de l’effort !
L’hospitalité implique la réciprocité tant et si bien que le même mot français désigne le maître de maison et son invité. Qui est l’hôte de qui ?
Avec Baptiste et Estelle, la question se posait vraiment, surtout le soir où sans avoir en rien mis la main à la pâte, nous découvrions la saveur tout à fait nouvelle pour nous des sushis, dégustés à la chandelle au clair de lune.
Ainsi selon l’adage de Zensin : « autour du foyer, il n’y a plus ni maître ni invité ».



JUILLET 2019 - L’ŒIL de l’AME


Entre Jean-Daniel et nous, le matériau de l’hospitalité n’a pas été la maison, le jardin, le papier ou l’encre, mais curieusement, Internet et ses boites mail. Cela nous ressemble peu et cela ne ressemble pas plus à Jean-Daniel JOLLYMONGE, photographe et réalisateur actuellement basé à Rouen.
Kamo no Chromei, moine japonais du XIIe siècle, s’était retiré dans une cabane en montagne. Dans les notes qu’il a laissées, il remarque combien les poissons semblent à l’aise dans le petit lac qui jouxte son ermitage. Les oiseaux sont dans leur élément quand ils planent et plein ciel, mais les hommes ? Où pourrait être leur élément ? Et la réponse arrive : l’homme peut vraiment être lui-même sans complexe ni arrogance, dans la convivialité. Voilà son véritable élément.
Une véritable rencontre s’est progressivement tissée avec Jean-Daniel grâce aux courriers partagés : hé oui, « Simplement assis, le printemps vient : », toujours Zensin.
« Personne n’est trop ordinaire à photographier. Jamais. » écrit Jean-Daniel
« Le familier apparaît comme insolite et l’insolite comme familier » à celui qui sait réellement observer.
Jean-Daniel refuse de créer des images finies, fermées, jolies. Pour lui, la photographie est suggestive, elle n’a de sens que si elle suscite une conversation, un dialogue. Dont acte.
Jean-Daniel a travaillé avec des personnes en difficulté, souffrant d’exclusion ou tout simplement d’anonymat. Il s’agissait, pour elles et lui, de commencer à « vaincre l’invisibilité qui les frappe ».
La personne exclue « est en-dessous des mots ». « Elle n’a plus l’énergie de s’exprimer. A la place de la parole, le cri. A la place du silence, le vide. Il y a des cris qui nous échappent comme le sang s’échappe d’une blessure. Il y a des gestes hagards, ignorants s’ils sont expressifs ou pas, peu importe, ils sont là, mais pour personne ; seulement parce que la vie doit se survivre. »
Et c’est là que le photographe s’intéresse à la personnalité et l’originalité de chacun.
« J’ai rencontré des personnes qui me donnent leur regard…
J’ai rencontré des visages qui attendent ma responsabilité. »
« …De même que les visages sont une brèche au milieu de l’indifférence et de l’uniformité, j’espère que mes photographies évoquent quelque peu cette brèche-là. »

Si vous voulez contempler des photos qui nous regardent, le blog
http://jeandanieljollymonge.blogspot.com/
vous attend. Ne le manquez pas !



JUIN 2019 – CONVIEES à TOURNER la TETE
là où on n’a pas VRAIMENT ENVIE de REGARDER


Animer à l’Abbaye de Belloc cette semaine de retrouvailles d’un groupe de Filles de la Charité (St Vincent de Paul) qui souhaitaient fêter ensemble leur Jubilé (50 ans d’engagement auprès des personnes en cumul de pauvreté) fut un temps d’une fécondité incroyable pour nous comme pour elles.
Nous avons été, bien évidemment conviées à tourner la tête vers où on n’a pas vraiment envie de regarder. D’une part la situation sociale qui, se dégradant, engendre des situations de pauvreté de plus en plus sévère et d’autre part, l’arrivée inévitable du grand âge et donc l’entrée, progressive ou non, en dépendance. Comment ne pas être mieux renvoyées à nos peurs primitives ?
« Prendre conscience de nos peurs, c’est assumer que nous sommes constitutivement démunis. Se connaître avec ses pauvretés implique d’avoir à décider comment vivre avec elles » (Nicole Carré).
Nous avons découvert des sœurs Ô combien courageuses, jamais fatalistes, jamais résignées, jamais sans projet, jamais enfermées dans « la charité chrétienne » qui à trop se pencher sur les pauvres, risquerait de les écraser.
Ces sœurs-là n’évoquent que cet amour qui se vit seulement dans la réciprocité et qui donne à chacun de se sentir utile et de devenir constructeur du bien commun.
Ces sœurs refusent de distribuer, d’assister, bien qu’elles y soient parfois contraintes par l’urgence, mais l’enjeu demeure d’entrer en relation (ainsi sont-elles aussi les sœurs du photographe Jean-Daniel -dont il est question plus haut- qui justement a travaillé avec des équipes de Saint Vincent de Paul) pour entendre de chaque personne en précarité leur propre perception de la vie.
Car leur expérience leur donne une expertise incontournable que pourtant, trop souvent, nous contournons.
Paul Ricœur constatait : « nous ne sommes plus avec les pauvres si nous ne sommes pas contre la pauvreté, c’est-à-dire, si nous ne refusons pas les circonstances qui accablent une si grande partie de l’humanité.
Que faire, à notre si modeste échelle, face à la déshumanisation de l’économie qui transforme tout en marchandise, y compris les êtres humains ?
D’humbles réponses pratiques s’imposent.
Des sœurs y travaillent
Jean-Daniel y travaille
http://jeandanieljollymonge.blogspot.com/
Et nous ? Que faisons-nous contre l’invisibilité sociale ? Quelles rencontres personnelles ? Quelles attentions préférentielles ?



AVRIL 2019 – PARTICIPER à « UN MILLION de REVOLUTIONS TRANQUILLES »


Avril s’est déroulé pour nous sous le signe du philosophe Abdennour Bidar quand il nous invite à participer activement à la « résistance tisserande Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes tisserands : J’appelle tisserands, ceux qui combattent pour relier la vie » dit-il, non sans ajouter que nous ne sommes pas impuissants, nous avons, chacun où nous sommes, la possibilité de participer à « un million de révolutions tranquilles », en travaillant à la « reliaison du monde ». L’expression n’est pas très poétique, il est vrai, mais tellement efficace !
Avec Guy, actuellement éducateur à la PJJ (Protection Judiciaire de la Jeunesse) de Mayotte, nous avons pris le temps de faire des choses qui ne vont pas vite : marcher, faire du vélo, cuisiner, se baigner dans les eaux glacées d’un lac voisin, rentrer du bois pour l’hiver… Rien que pour la joie de mieux se redécouvrir après 10 ans. Alors forcément, quelque chose se passe d’imprévisible. La conversation, tout en restant au raz du terrain de nos expériences, rejoint les grandes questions éthiques, politiques, sociales, internationales, les enjeux de la planète et j’en oublie !
Avec Guy « une heure n’est pas qu’une heure, c’est un vase rempli de parfums, de sons, de sourires et de climats » (Proust) ajoutons de fous rires aussi. Le temps n’est plus une course mais un sillon ; beaucoup de mots ont été semés et parmi les plus nourrissants, on trouve les graines de la confiance, de l’amitié, de l’engagement avec les moins munis.
Continuons à creuser avec nos mains la terre de nos profondeurs et stimulons-nous mutuellement !



AVRIL 2019 - S’ELANCER sans S’EMPRESSER


Selon le mythe taoïste de Pangu, la création du monde a pris au moins 18 000 ans. Quant à Lao Tseu, il aurait passé 81 ans dans le ventre de sa mère ! Ainsi, les chinois nous disent combien la maturation des choses est essentielle.
Le mouvement Laïc 21 (entendre : les laïcs du 21e siècle) est en train de rénover son site pour se rendre, d’un clic de souris, accessible à tous.
En pleine impulsion créatrice aux côtés de Francine Dubus, psychologue et théologienne, fondatrice de ce mouvement, Christine est venue de la Drôme, nous voir pour que nous l’aidions à retravailler les ébauches de ce site en refondation.
Nous avons pris le temps de nous réjouir ensemble de tout ce qui était déjà formulé avec justesse et précision. Reste encore à trouver les mots qui permettront à Laïc21 de briser sa coquille pour se déployer et prendre toute son envergure.
Il est bon, à un moment où à un autre, de nous sentir à l’étroit, ce qui est une posture fort inconfortable ; qui nous force à bouger… un peu comme quand on dort, à changer naturellement de position.
« Les mutations sont les effets naturels de notre sentiment d’inconfort » écrit une autre philosophe, Christine Cayol, qui vit depuis 15 ans en Chine. L’avenir de Laïc21 respire, tout près, déjà là. Sentons son souffle discret.



MARS 2019 - De LACAN en FERENCZI et de FREUD en WINNICOTT


Faire de la montagne ?
N’est-ce pas plutôt la montagne qui nous fait ?
En tout cas, avec Patricia, psychologue aujourd’hui installée à Toulouse, qui fut auparavant, éducatrice spécialisée dans les problèmes d’addiction, nous entrons dans les plis et les replis de la montagne basque, nous foulons les herbes et les cailloux, nous épousons sans faiblir les dénivelés. Mais le point culminant de nos balades n’est pourtant jamais le sommet : c’est plutôt l’échange !
De Ferenczi en Lacan, de Freud en Winnicott, de la Grèce à la Chine, des questions sur la transcendance en celles sur la foi en l’homme, nous avançons, sans les barrières si souvent dressées entre croyants, agnostiques, athées… Nous grimpons en formant ce que P. Hadot nomme une « communauté de recherche, d’entraide, de soutien spirituel ».
Comment marcher sans mettre mots et pensées en mouvement ? Et, ce faisant, sans se laisser réciproquement et intérieurement déplacer, par bonds successifs ?
Quand les dénivelés se font plus drus, tout doit alors se dire en une phrase, affaire d’économie de souffle ! Parler se continue alors en de longs silences qui ne causent aucune gêne. Il n’y a pas de sujet prévu d’avance, pas de montre, même pas d’itinéraires balisés, juste une énergie printanière qui circule entre nous. Un climat où l’on ne passe pas trop vite à autre chose. Ainsi, de la montagne, nous redescendons toujours légèrement !



JANVIER 2019 – "LE FLEUVE PLEIN DESIRE ETRE REMPLI"


Nous avons eu la chance d’accueillir à la maison et au gîte un groupe de jeunes lycéennes et étudiantes de Tarnos (Landes).
Le thème des rencontres, que nous avons souhaitées intergénérationnelles, était : la terre.
Et, avouons le, ce personnage principal a joué, à merveille, son rôle pendant tout le week-end, collant allègrement aux semelles (et plus si affinité) lors de la visite du jardin de Christian et Odile (voir ci-dessous) et aux doigts, bien entendu, pendant les heures d’atelier.
Nous avons découvert un groupe dynamique et très engagé, non pas « pour », mais « avec » le Burkina Faso et maintenant la Côte d’Ivoire. Et partant aussi du principe que les africains sont les porteurs de leurs propre développement, nous ne sommes que les adjuvants.
Mais c’est avant tout la pratique de la relecture systématique de leur vie et de leurs engagements qui nous a émerveillées dans ce groupe. Relecture à chaud, à froid, et même un an après les projets qui sont mis en oeuvre. Relecture dialoguée, puis écrite personnellement et enfin écrite collectivement. On est loin de l’engagement coup de cœur et superficiel.
Relire, c’est risquer nous disent-ils. Risquer d’évoluer, de « se faire bouger soi-même et en groupe » pour tenter de « faire bouger le monde ».
Les écouter, c’est alors être intimement convaincu qu’il est dangereux de BEAUCOUP parler autour de l’essentiel sans pour autant l’aborder. Il existe des paroles fumigènes (et cela nous concerne tous). Elles consistent à s’exprimer avec aisance et prolixité sans pour autant s’impliquer soi-même. Il existe aussi des paroles qui dérapent dans la critique acerbe, systématique ou pernicieuse. MAIS il existe des groupes qui avancent avec et par les autres, et qui, ainsi, contribuent à construire solidement ce « nous » qui fait parfois si cruellement défaut.
« La venue d’un hôte chez toi est un motif de gloire. L’hôte te rend grand, te donne du poids » dit-on en Afrique.
Merci les jeunes de nous avoir ainsi donné du poids (au propre comme au figuré, tant chacun des membres de ce groupe est un cordon bleu !).
« Connais-tu la parabole du fleuve ? Plus le fleuve est plein d’eau, plus il cherche de l’eau pour être davantage plein. Cela ne finit pas » Puissiez-vous continuer à chercher et à relire pour toujours mieux chercher encore et stimuler vos hôtes par tant de dynamisme !
Mais oui, sur, vous le pouvez !

Pour en savoir plus sur eux :
http://decouvertesolidarite.free.fr



1er JANVIER 2019 – BONNE ANNEE


Pour retrouver notre rétrospective de l’année 2018, rendez-vous sur la page « Témoignages et chroniques annuelles » dans la colonne de droite.



AUTOMNE 2018 - LES TERRES DES POSSIBLES


Il est temps de vous emmener en promenade dans le magnifique jardin de nos amis Christian et Odile : « Les terres des possibles ou Ahalen lurrak", car cela revient à célébrer la vie, la générosité de la nature respectée et travaillée avec amour : rien ne manque sur cette terre, encore en friche il y a quelques années : des légumes appétissants, de jeunes arbres fruitiers, une serre à roulettes, des petites vaches Galloway qui entretiennent les pentes, et depuis peu, 5 belles brebis qui vont chauffer la serre à semis. Un premier agneau y est né.
Un projet fruit de leurs multiples talents et expériences respectives : Elevage pour Christian, maraîchage en agroécologie et accompagnement de personnes en réinsertion pour Odile, réalisé avec la plus grande économie de moyens, beaucoup d’ingéniosité, de savoir-faire, de poésie aussi !
Leur désir est de montrer qu’un jardin de 1000 m² travaillé avec intelligence peut nourrir et faire vivre une famille de 4 personnes ; qu’il peut aussi être un lieu de formation pour des jeunes en apprentissage ou en reconversion. Ils accueillent en ce moment en partenariat avec « Fermes d’avenir » https://fermesdavenir.org/
des stagiaires pour une période de deux mois dans le cadre d’un compagnonnage en binôme avec un réfugié.
Leur disponibilité n’est Jamais prise en défaut pour un coup de main ou pour partager certains accueils avec nous.
Ils sont aussi, et ce n’est pas le moindre des services qu’ils nous rendent, les sympathiques nounous de Barbotine lors de nos nombreux déplacements.

Pour une promenade poétique et pédagogique, une adresse :
https://cdvarin.wixsite.com/ahalen-lurrak



SEPTEMBRE 2018 - LE POTIER CHINOIS


D'un pays où les mots disent ce qu’ils font…


Oui, même le chinois arrive jusqu’à nous, via une amie fidèle qui se passionne depuis peu pour cette langue des origines, ses enfants étant partis travailler là-bas.
Elle n’a pas manqué de nous dénicher ce petit trésor : comment écrit-on « travailler l’argile » en chinois, c’est-à-dire, faire le potier ? Et bien quoi de plus évident : en alliant la main, la terre et le soleil bien sûr ! »



AOÜT 2018 – AGIR, C’EST CONNAITRE LE REPOS


Faris, notre jeune ami palestinien est revenu passer quelques jours avec nous pour notre plus grande joie.
Décidé à ne pas entrer dans le moule de la violence, il continue d’avancer pas à pas : après l’espagnol l’année dernière, il a commencé à apprendre l’allemand à Hambourg cet été, et cherche des stages dans des grandes entreprises européennes en « mechanical engineering », passe des entretiens, continue ses études d’ingénieur. Jamais il n’a laissé le désespoir commander sa vie. « Agir, c’est connaître le repos », paradoxe ô combien exact décrit par Fernando Pessoa.
Avoir des objectifs, dégager des moyens et in fine « y aller » sans économiser son énergie, car au bout de l’action, Faris se crée un bel équilibre ; ce qui n’est pas rien quand on vit quotidiennement dans un pays qui n’est plus qu’une prison à ciel ouvert.
Une boussole bien sûre lui indique vert où se trouve la vie et pas seulement le vivable.
Souhaitons aux jeunes européens qui marinent si souvent dans l’inquiétude, le même appétit de vie, même quand il semble ne plus y avoir de chemin.



AOUT 2018 – UNE POIGNEE DE FORCES BIENVEILLANTES


« L’oiseau se reconnait à son plumage, le bœuf à ses cornes, l’homme à sa langue », dit un proverbe basque. Et vous ne couperez pas à la version originale : Xoria lumatik, idia adanitik, gizakia hitzetik.
Beaucoup de langues différentes ont chanté sous notre toit cet été : l’arabe, le castillan, le galicien, le c'hti, le patois lyonnais, l’anglais, le basque et parfois même le français !

- Beauté de l’immobile : les montagnes faces à nos fenêtres qui tirent nos idées vers la verticale.
- Beauté du mouvement : il conduit nos amis jusqu’ici, dans notre petit coin à une heure de toute ville digne de ce nom, le tissu du monde se déplie.
Chanter, danser, s’en remettre aux gestes et aux mimiques, répéter, répéter et répéter encore pour se comprendre.
« Au Panthéon des grands droits, inscrivons un droit à la mondialité de la relation. Ce serait comme jeter une poignée de forces bienveillantes dans le chaos des forces brutes » propose Patrick Chamoiseau.



JUILLET 2018 – POUR ARRIVER PLUS VITE A L’ATELIER


Souvenez-vous de la devise des Shadocks : « Quand on ne sait pas où on va, il faut y aller et le plus vite possible ».


Une nouvelle signalétique étant apparue sur nos murs, c’est donc le plus vite possible que vous parviendrez désormais à l’atelier.
Tout avait commencé il y a trois ans, lorsque nous avons déménagé, avec l’idée de faire nous-mêmes de jolis panneaux…
Mais c’est une tradition bien connue : entre le moment où nait l’idée et celui où elle peut s’afficher, du temps passe... Nous avons eu à cœur de respecter la tradition !
Mais maintenant, sentez-vous attendus et conduits jusqu’à l’atelier : il n’est pas forcément inutile de téléphoner avant pour vérifier que nous sommes bien là pour vous accueillir.



JUILLET 2018 – L’ART DIFFICILE DE NE RIEN FAIRE


Un frère d’En Calcat qui a longtemps été hôtelier et qui maintenant a pris la poudre d’escampette vers le ciel pour s’y faire accueillir, disait souvent, l’âge venant : « Moi, je ne fais rien, mais il me faut beaucoup de temps pour le faire ».
Selon les mots-mêmes de frère Olivier, nous souhaitons chaleureusement à toutes celles et ceux qui ne sont pas astreints tout l’été au travail, de prendre beaucoup de temps pour ne rien faire !
Barbotine essaie de nous convier chaque jour à cet art auquel les chats excellent si naturellement !



MAI 2018 – DEPUIS LES RUES DE PARIS


« Il est urgent d’avancer les uns jamais sans les autres »


Il y a des gens qui ressemblent aux tisons qu’il faut pousser dans le feu pour qu’ils s’enflamment.
Ce n’est pas le cas de Danièle et loin s’en faut car sa vie brûle toujours d’une si bonne chaleur….
Venue une semaine en vacances dans le gîte, nous avons eu la chance de bénéficier de son témoignage. Car Danièle est une consœur potière qui a monté, à Paris, un atelier pour les gens de la rue. Elle est aujourd’hui, à cause d’un récent changement de quartier, à la recherche d’un nouveau local du côté de Saint Merry… à bon entendeur…
Danièle ne supporte pas que les gens de la rue soient condamnés à l’insignifiance. Généralement on les appelle les « sans », ce qu’elle-même ne fait jamais : « sans domicile fixe » « sans abris » « sans papiers » … en un mot les sans-importance, les anonymes.
Toute la vie de Danièle rappelle (et même crie) encore et encore, combien ces personnes marginalisées ne sont justement pas le peuple des gens passifs.
Les gens de la rue sont des vivants, ils ont des trésors d’imagination, sont poètes à l’occasion, artistes souvent et offrent à qui sait les écouter une belle force créatrice.
Le pape qui les a reçus avec attention, leur a d’ailleurs dit qu’ils étaient sa source d’inspiration.

Danièle donne de l’oxygène à nos vies. Il a suffit d’une semaine pour que nos horizons soient nettement élargis.
« Les gens de la rue ont droit à la beauté » insiste-t-elle à temps et à contretemps, portée, comme toujours par le souci de leur dignité.
« Le droit à la beauté est une expression urgente du droit à la vie ».


Un proverbe africain dit :

« Le cœur n’est pas une articulation pour qu’on le plie ».


Celui de Danièle ne plie jamais
Et un autre le complète :

« Tant que le soleil ne s’est pas encore couché, ne dédaigne point les pas de la tortue »


Alors à petits pas de tortue, il est urgent d’avancer, les uns jamais sans les autres.



MAI 2018 - SAVEUR DU SILENCE


« Eau peu profonde ne porte pas le bateau ». Zhuang Zi


Directement arrivée de la Courneuve en bus de nuit, S. est venue naviguer vers les eaux profondes du silence. Notre petit gîte se transforme pour l’occasion en ermitage : une semaine pour s’asseoir et regarder sa vie dans un prisme nouveau.

Le trésor, la perle, les poissons, tout se trouve au cœur d’une semaine de Grand Silence
«Pour aller plus loin vers les autres, à l’extérieur de nous-mêmes, il nous faut d’abord creuser vers la graine, le levain, la perle, le trésor de ce champ ou de cette mer que nous sommes ». (B. Vermander. Sj)

« Ah, la voie du ciel
Comme un arc tendu.
Le haut est abaissé
Et le bas se relève » (Le livre de la voie et de sa vertu ch. 77).


Bonne semaine et savoureux silence !



FEVRIER 2018 - PEUT-ON ETRE TROP BON ?
Nos vies pivotent sur des questions comme sur des gonds


La mer est salée parce qu’il y a des morues dedans. Et si elle ne déborde pas, c’est parce que la providence, dans sa sagesse y a placé aussi des éponges » belle définition d’Alphonse Allais, non ?
C’est à Saint Jacut dans les Côtes d’Armor que la mer, une fois de plus, nous a tous conviés avec une question pour radeau inconfortable : Peut-on être trop bon ?
Dix personnes engagées dans les milieux médicaux, commerciaux, viticoles, financiers, mais aussi dans des engagements d’animation, de réflexion, d’accompagnement, d’écoute, de partage avec les gens de la rue, des réfugiés syriens, des personnes seules... venaient prendre le vent et le large d’une question qui dérange.
Peut-être à cause de Socrate, on a souvent dit que c’est surtout la question qui compte. Mais ce n’est à notre avis pas exact : ce sont les réponses qui comptent, car elles nous tirent et nous poussent en avant.
Il est vrai cependant que "La pertinence d’une réponse se mesure, non à sa capacité à résoudre ou dissoudre la question, mais à la rendre plus aigüe." (Cugno).
Alors, Peut-on véritablement être trop bon ? existe-t-il question plus aigüe aujourd’hui ?

Bien parcourir le terrain d’une question, est ce qui nous incombe. Pendant deux jours et demi, c’est avec l’évangile de Marc que nous avons cheminé, dépliant progressivement une réflexion sans réponses toute faites, universelles ; sans évidences irréfutables.
Notre rôle ? Donner des éléments pour « bien avoir en main » la question, ce qui revient justement à ne pas trop en dire ou répondre à la place des autres.
La réflexion qui nous intéresse est artisanale. Les doigts dans l’argile autant que les échanges font apparaître l'essentiel.
Mais restons au bord de la mer : le philosophe Leibniz collectionnait les mêmes petits coquillages d’une plage pour vérifier patiemment qu’ils étaient tous différents.
Chaque participant a donné au groupe l’opportunité de vérifier tout aussi patiemment, combien les réponses sont uniques… et restent nécessairement à l’état naissant. Juste une promesse de réponse presqu’à terme. Voilà que qui s’est passé et qui peut sembler frustrant à certains. Il faut pourtant s’y faire : Questionner, c’est pouvoir attendre, même une vie entière. disait Heidegger.

Deux jours et demi de réflexion ne sont-ils pas pertinents que si l’on ne repart avec plus d’attente encore que l’on ne pouvait en avoir au départ ?
Continuons à chercher, creuser et trouver la question qui demeure dans la question qui a été posée.
Il ne reste donc plus qu’à souhaiter Bon vent à chacun !



FEVRIER 2018 - SAGESSE ET FOLIE DE LA RELATION


10 et 11 février, alors que la neige est encore accrochée aux sommets, le poêle ronfle dans l’atelier et le gîte s’est fait cocon d’hiver pour recevoir un groupe d’amis venus de Pau. Habitués à réfléchir et partager ensemble, ils ont toutefois souhaité prendre un week-end hors de leur Béarn pour mieux se connaitre et creuser le sens de la fraternité. C’est l’étude du mythe de la Tour de Babel qui nous accompagnera pendant ces deux journées et le sens déplié de ce texte vieux de plusieurs milliers d’années se révèlera d’une pertinence étonnante pour nos relations d’aujourd’hui : et si les « briques » fabriquées et assemblées d’un seul cœur par les Babyloniens n’étaient autre qu’une belle « langue de bois » ? Qu’est-ce qu’alors que le langage ? Que faisons-nous de nos irréductibles différences ? Les murs sont-ils bons et nécessaires ? Comment les franchir ? Comment construire une véritable fraternité qui respecte l’altérité ? Comment nous « considérer » les uns les autres ?
Travaux pratiques avec briques et argile et mise en œuvre des stratégies possibles pour « passer les murailles ; parmi la vingtaine d’attitudes exprimées voici quelques-unes des stratégies de prédilection retenues par le groupe ; Quelles seraient les vôtres ?

Contournement par l’humour
Chercher de l’aide – mobiliser l’équipe
Ecouter ceux qui prennent du recul – quête de la solidarité – trouver les failles/passages
Requérir la technique, l’expertise à plusieurs
Retourner la colère en source d’énergie, de mise en route
S’asseoir – évaluer à plusieurs – dialoguer
Tourner la page – changer de combat – faire preuve de lucidité
Mettre des mots – parler avec quelqu’un d’autre



JANVIER 2018 - MERCI ANTOINE, MERCI VICTOR


Nous avons commencé cette page de chronique le 20 janvier 2016 avec un "Merci" à Antoine et Victor qui créerent notre site il y a maintenant 12 ans et veillent sur lui depuis lors.
En ce début 2018, nous leur renouvelons notre gratitude puisqu'ils ont mis à notre disposition un nouveau logiciel, simple et maniable, qui nous a permis de rendre notre site "responsive", d'en renouveler le contenu et de l'enrichir.
Nous espérons, que vous le trouverez simple et agréable à consulter, quel que soit le type d'écran que vous utilisez.



NOVEMBRE 2017 - ATELIER D'ECRITURE à RHUYS


Week-end de la Toussaint un peu gris, un peu venteux. 8 stagiaires venus qui de Lyon, qui de Paris, qui du grand Ouest, se sont retrouvés désirants, passionnés, un peu tendus parfois : "J'ai un projet, je suis bloqué, vais-je y arriver ?" "J'aime écrire pour moi, comme ça me chante, j'ai envie de tenter l'aventure avec d'autres pour me stimuler, me renouveler" "J'ai surtout besoin de liberté"...
Avec l'Océan à deux pas, l'accueillante terrase du café de l'autre côté de la grille d'entrée, les chambres, le cloître, la salle... les lieux d'écriture ne manquaient pas.
La grande variété des propositions après de courts exposés en début de journée et d'après-midi, la possibilité de venir à tout moment se détendre ou chercher de l'inspiration les mains dans l'argile, le temps commun de relecture libre en soirée et la bonne volonté de tous ont fait de ces quelques jours un espace joyeux et d'une créavité débordante !
A refaire, à l'unanimité !

PIERRES de GRANIT

Lumière verte
Pierres de granit empilées en un mur, enserrant la clôture ou cernant un arbre, des arbres porteurs de feuillures vertes : le chêne vert que je découvre, feuilles vernissées, serrées, glands luisant de vert avec leur cupule terreuse ; le laurier aux feuilles plus larges tout aussi vernies, est-ce bien un laurier ?
Pierres de granit, teintées de vert, oxydées tels des bronzes, chatoyant cette lumière irisée de verts fondus, quasi liquides.
Pierres de granit sans âge, témoins et marqueurs du temps, flottant dans ce monde, rescapées des contes de temps médiévaux.
Pierres de granit reprenant à l'horizontal les rides verticales des troncs burinés des arbres.
Rugosité du toucher, acuité de la perception de l'ici et maintenant en même temps de l'ailleurs autrefois.
Pierres de granit, nostalgie celtique suscitant le souvenir de la voix rocailleuse d'Armand évoquant sa terre natale si vitale
Pierres de granit tu m'enracines à la nature, aux profondeurs de la vie, aux souterrains de l'inconscient
Pierres de granit, ancrage de mémoire et de sensations
Lumière verte diffusant et infusant la contemplation de l'instant
Epiphanie. MCD



SEPTEMBRE 2017 – DEGUSTER


Il était utopique de planter piments, courgettes, tomates, aubergines, fraises, framboisiers… dans notre bout de prairie qui porte si bien son nom d’Arbaila ou fondé sur du caillou.
Mais sans doute Michelle s’est-elle promis de ne jamais cesser d’aimer, quoiqu’il arrive, la terre qu’elle a sous les yeux et surtout dans les mains. Et, non sans sueurs, ampoules et courbatures, le miracle est advenu : nous nous régalons !
Le croquant, le goût, la quantité de jus, l’imprégnation des papilles, le parfum qui subsiste une fois qu’on a avalé le fruit ou le légume, tout nous réjouit.
Les petites quantités récoltées favorisent la dégustation des saveurs ; le merveilleux travail de nos amis Christian et Odile, récemment installés en vrais professionnels de l’agrobiologie, à quelques kilomètres de chez nous, contribue bien à propos à nous combler aussi.

« Mon vœu le plus cher est que chacun des légumes que je cultive arbore son plus beau sourire et montre ainsi le meilleur de lui-même, le meilleur absolu » écrit le grand jardinier Asafumi Yamashita. Du côté de chez Michelle, Christian et Odile, le pari est d’ors et déjà réussi.



AOUT 2017 - BOUGRES DE FAUX JETONS A LA SAUCE TARTARE !


Sainte Thérèse d’Avila écrit pour ses moniales une lettre avec ces mots : « Mes sœurs, souvenez-vous, Dieu va parmi les marmites en cuisine ».
Qu’à cela ne tienne, nous sommes donc descendues en cuisine, mais dans les cuisines de notre pays la France et là, mille millions de mille sabords, quelle tambouille nous avons découvert !

En effet, l’objectif était (et malheureusement demeure toujours) d’aider notre vieil ami Mérez, d’origine tunisienne, vivant en France depuis une quarantaine d’années et ayant de ce fait, acquis la double nationalité française/tunisienne. Reconnaissons toutefois, si ce sympathique jardinier et plongeur en restaurant a toujours travaillé, cotisé et vit maintenant d’une modeste retraite française obtenue en bonne et due forme, il n’est pas devenu un grand champion de notre langue. Dans des conditions similaires, deviendrions-nous forcément des pros de l’arabe ?... Pas certain en ce qui nous concerne ! Mérez se fait comprendre et comprend le langage quotidien ; il a tissé des liens avec des familles françaises devenues ses amis. Veuf depuis quelques années, Mérez vient de se remarier « au pays » avec une femme ne portant plus le voile et voudrait, cela semble légitime, faire venir son épouse Wahiba en France. Il a un logement et les moyens de subvenir à leurs moyens à tous deux.
Bien.
Mérez ne comprenant rien à l’administration française et le Consulat à Tunis ne mettant aucune bonne volonté à l’aider, voici que nous entrons en lice. Car c’est bien d’un vrai combat dont il s’agit. Disons-le haut et fort, malgré ses récentes grandes déclarations officielles, la France semble tout faire pour verrouiller l’entré de tout étranger en France, fût-ce la femme d’un français solvable !
Mais peut-être y a-t-il « FRANCAIS » et « français ?
Le combat commence pour obtenir à Nantes la transcription du mariage tunisien sur les registres français : une liasse de papiers est à réunir, une montagne même ! Puis, il faut s’attaquer à la demande d’un visa de longue durée. Et pour cela, il est nécessaire d’ajouter à la première montagne : des copies de visas, un livret de famille, des attestations d’hébergement (3 !), une lettre d’établissement, des formulaires pour le consulat, des formulaires pour l’OFFI, des extraits de casier judiciaire, des timbres fiscaux bien entendu, et j’en passe !! Le tout, photocopié plusieurs fois et traduit officiellement en français, ce qui n’est pas gratuit on s’en doute !
Et voilà : quand les différentes administrations ont fini par bien vouloir délivrer, toujours au compte-gouttes, leurs paperasses… la validité de deux mois de l’acte de transcription du mariage est expirée… Retour à la case départ comme dans un Jeu de l’Oie infernal !
Mouvement perpétuel ou arrêt perpétuel à nos frontières solidement défendues par l’Administration ? La question est posée.
Nous ne désarmons pas. On fera TOUT pour que Wahiba rejoigne son mari. Sentant notre détermination, Mérez, musulman, s’est écrié « Vous êtes des cadeaux de Dieu ! ». Voilà un des plus beaux compliments reçu à ce jour… Ainsi Dieu se trouve effectivement parmi les marmites brêlées de la cuisine administrative française. Que cela se sache !



AOUT 2017 - LE PLAISIR DE PRATIQUER L’HOSPITALITE


Le Français dit si bien les choses : un même mot, « hôte », désigne à la fois le maître de maison et son invité. Qui est alors l’hôte de qui ? Qui donne et qui reçoit ?
Notre gîte, depuis la fin de l’hiver, nous permet, désormais pleinement, de donner corps, à l’accueil mutuel.

Accueillir grâce à un gîte prévu pour cela est une bonne école pour garder un esprit de débutant ; car les liens sont toujours à commencer et recommencer. Une famille part. Une autre arrive avec des attentes différentes. Un style de vie qui n’a rien à voir avec les hôtes précédents.
S’adapter avec une exigence rigoureuse fait partie de notre joie.

Au XIIe siècle, Kamo no Chômei écrit un petit texte, devenu célèbre : Souvenirs de ma cabane de moine. Ancien grand dignitaire à la cour impériale, cet homme sage avait décidé de se retirer dans la montagne. Il prit alors le temps de remarquer combien les oiseaux semblaient à l’aise dans l’air et combien les poissons étaient agiles dans l’eau. Et il se demanda pourquoi de leur côté, les hommes ne semblaient jamais être dans leur élément. Ils marchaient souvent accablés, avec le poids de l’univers sur leurs épaules. Où pourraient-ils bien être dans leur élément ?

Rikyu, quelques siècles plus tard, finit par répondre : L’élément de l’homme est la convivialité.
Ce qui se déroule dans l’épaisseur, jamais banale, de l’hospitalité quotidienne.
"La voie ? Ton cœur ordinaire" (Rinzaï)
En avant donc !



JUILLET 2017 - INTERNET ET NOUS


Un mois de panne d’Internet, accompagné d’un « léger » sentiment d’usure quand il s’est agi de voyager des heures durant par téléphone en pays Orange pour tenter de résoudre le problème, fut à notre programme en ce mois de juillet.

Dans un milieu rural pas assez peuplé pour être rentable, relancer une entreprise pourtant sensée nous réparer dans les 8 heures, en vertu d’un contrat professionnel dont le prix pèse son poids (« prudence est mère de sûreté », croyait-on naïvement), est un feuilleton dont les épisodes se ressemblent hélas beaucoup trop pour tenir un public en haleine !

Mais un mois sans connexion à la maison c’est aussi un mois pour prendre le temps de sortir quotidiennement de chez nous et partir à la cueillette ici et là de nos mails. Ce qui revient donc à dire : un mois pour retrouver la poétique du corps, tout en contrecarrant l’illusion de l’urgence.
Un mois aussi pour mieux prendre conscience de la formidable utilité de l’outil numérique et en même temps, un mois pour nous rappeler combien il est nécessaire de relire régulièrement nos pratiques et repérer tout aussi bien ce qui construit, enrichit, facilite et ce qui nous berne et nous appauvrit
La question est finalement toujours la même : en vue de quoi nous connectons-nous ? Jusqu’où désirons-nous être connectés et comment ? Quelle parole écouter, offrir et partager ? Quelle parole taire ? Et ce faisant, quelle communauté humaine construire en ce lieu-là ? Etre connecté est-ce toujours être relié ? Une forêt de questions au milieu de laquelle Orange nous a «invitées» à nous promener longuement. Tout le temps nécessaire pour faire de belles randos nous fut offert gratuitement. C’était juillet, chaud et sec, ça tombait bien non ?



MAI 2017 - VOYAGE AU PAYS DU TOUCHER


Notre peau est ce qui nous sépare du monde tout en nous y reliant. Elle nous donne notre forme individuelle, nous protège, nous rafraîchit ou nous réchauffe selon les besoins, retient nos fluides, produit de la vitamine D… Elle se renouvelle constamment et se reconstitue si besoin est.

Elle pèse de 3 à 5 kg et c’est le plus grand des organes de notre corps.
Plus merveilleux encore : nous ne nous contentons pas d’avoir des empreintes digitales uniques, il n’est jusqu’aux pores de notre peau qui ne soient également uniques.
Notre peau représente 16 % du poids de notre corps et couvre plus d’1,60 m² !
Enfin, c’est en elle que réside le sens du toucher.
Un groupe de réflexion et de parole est venu de la Côte (basque) jusqu’ici faire un voyage inédit au Pays du Toucher : volupté pour les uns, légère épreuve pour les autres ; émotion pour tout le monde.
Dans la parole se joue quelque chose de notre humanité et en ce sens, elle n’a pas de prix.

Dans la parole, on s’engage, c’est-à-dire, étymologiquement, on laisse en gage ; on offre une trace pour les autres.
Tous auront cependant redécouvert que le toucher, avec son exigence propre, est engagement aussi. Et que l’on répond de son toucher comme de sa parole.
Ceux qui parlent s’engagent.
Ceux qui touchent s’engagent.
Parole et toucher mettent en jeu un engagement commun.
L’objectif de la virée en pays du toucher fut atteint.
Restait à festoyer dans les rires. Nous l’avons fait !



AVRIL 2017 - VISITE DU BOUT DU MONDE


Le printemps est propice aux visites et celui-ci, qui fut particulièrement ensoleillé après Pâques, ne fit pas exception à la coutume.

FARIS, jeune cousin de Suad que vous connaissez bien maintenant, est venu de Bilbao passer quelques jours avec nous, découvrir un autre visage du Pays Basque, rural et montagneux.
Quand on a 20 ans à Ramallah et qu’on n’a pas encore eu la chance de quitter son pays microscopique et en miettes, on n’a jamais vu la mer –sinon de très loin, en grimpant sur la plus haute colline de Tulkarem- on n’est jamais non plus entré dans Jérusalem.

Décider et obtenir une bourse pour aller étudier six mois à Bilbao, c’est soudain ouvrir une grande fenêtre sur le monde, découvrir ce que c’est de se déplacer librement sans être arrêté tous les 10 kilomètres par des check-points tatillons, pouvoir prendre un bus de nuit et se sentir en sécurité, traverser une frontière sans avoir à sortir ses deux passeports, sa carte d’identité, son autorisation de sortie du territoire et…. Quoi encore ? c’est aussi découvrir un horizon qui n’est pas coupé par des kilomètres de murs, c’est pouvoir aller à la plage aussi souvent qu’on en a envie, prendre un vélo, un bus, aller voir des amies de sa tante, grimper en haut des montagnes et respirer à pleins poumons !

Faris est un garçon déterminé, curieux de tout, intelligent et observateur.
Faris fait des études d’ingénieur et aime « trouver des solutions là où il y a des problèmes ». Il aimerait bien construire ou réparer les avions (pour s’envoler loin ?). Il a été fasciné par le vol des vautours et a remporté en souvenir des grands espaces de ciel une grande plume de l’un d’eux dans son sac à dos.
Il nous a appris à danser la debkka palestinienne (dans sa version la plus simple s’entend !), comment enrouler convenablement un keffieh sur sa têtes pour se protéger du soleil, du vent et enseigné la symbolique des couleurs et des motifs de cette coiffure selon les pays, fait goûter le vrai café à la cardamone, cuisiné salades et omelettes à la mode de chez lui…et bien sûr mis les mains dans l’argile.
Pendant trois jours, Arbaila a vécu avec un parfum d’Orient dans ses murs. « Le seul risque » nous a-t-il confié avant son départ, « c’est, quand je vais rentrer à la maison, d’avoir un peu l’impression de rentrer en prison ! Mais j'ai bien envie de revenir vous voir.»



MARS 2017 - AU PRINTEMPS, LES VACHES ARRIVENT DANS LES PRES ET SUR LES MURS


Si les prairies commencent à s’émailler des taches blanches des brebis et du beige des Blondes d’Aquitaine, OLGA quant à elle est grimpée sur le mur de notre maison et entend bien y rester ! Olga est l’œuvre de Jean l’Artibricolo, passionné par l’argile ; nous vous parlions de ses expérimentations en octobre dernier (voir ci-dessous).
(facebook.com/jean.artibricolo)

Invitées à nous arrêter dans sa maison familiale en Vendée, dont les murs sont couverts d’œuvres créatives, les siennes et celles de son épouse, nous avons pu nous émerveiller de ses tentatives brillamment réussies avec de l’argile récupérée au fond d’un lac mis à sec pour un nécessaire nettoyage et cuites avec patience dans son poêle à bois ! De véritables œuvres d’art sont nées.

Et nous sommes reparties avec Olga dans notre camionnette, qui fort heureusement ne pesait pas ses 800 kg habituels car elle est le fruit de l’inépuisable imagination de Jean et de son aptitude à donner une seconde vie pleine d’humour à de vieux outils et ustensiles de cuisine. Olga accueille désormais nos visiteurs avec ses grands yeux ingénus et ses grandes oreilles. Et maintenant quand vous toquerez à notre porte surtout prenez le temps de lui répondre par un sourire.



DECEMBRE 2016 - NOEL APPROCHE


Puisque nous en sommes aux mercis, continuons.
J’ai appris hier que le mot « métier » étymologiquement signifiait : « ministère mystérieux ».
Et de fait, nous entrons dans le ministère mystérieux de l’art d’empaqueter.
Car Noël approche. Nous avons laissé rêver l’argile et elle s’est transformée, par la grâce conjuguée des mains et du feu, en pots ; de toutes tailles ; de toutes couleurs ; ils vont alors délicatement se poser sur nos étagères : premier miracle.

Quand ces mêmes pots, jusque-là en attente anonyme, se transforment en cadeaux choisis pour des visages singuliers, nous entrons alors dans le second miracle.

Merci aux acheteurs qui, presque sans bruit, nous aident ainsi à être plantées là, quartier Gibraltar, Atelier d’Elordoï, et à y rester !
Leur fidélité discrète nous va droit au cœur.
Merci enfin aux plus inventifs d’entre eux qui n’hésitent pas à faire leurs emplettes à distance : la recette est simple : nous envoyons des photos des dites étagères, ou mieux une sélection de réalisations qui pourraient convenir et une fois les choix faits, Michelle fait les paquets et expédie au destinataire (qui peut être différent de celui ou celle qui commande).
Il faut beaucoup de métier pour cela car le voyage postal est risqué ; mais nous assumons les risques ! Et c’est là que Michelle entre donc en ministère mystérieux et le troisième miracle, c’est que ça marche !



NOVEMBRE 2016 - LA VOIE DES FLEURS


Au milieu d’un week-end consacré au livre de Ruth, nous avons lâché stylos et boules d’argile pour nous laisser guider par Marie-Thérèse Carles dans l’art du jardin. Nouvelle et merveilleuse expérience : Marie-Thérèse, qui a voyagé jusqu’au Japon pour se former, enseigne depuis longtemps la voie des fleurs.

Des liens d’amitié nous réunissent, ainsi qu’à sa communauté, et cela ne date pas d’hier.
Du coup, chez elles, c’est un peu chez nous et réciproquement.
Chaque année, l’automne nous ramène à Pessac, où toute la communauté nous accueille sous son toit pour deux jours conviviaux et œcuméniques de travail biblique et artistique.

Mais cette année, la collaboration s’est faite encore plus étroite pour la plus grande joie de tous.
Dimanche matin, sécateurs en main, nous avions mission d’aller observer toutes les fleurs, plantes et feuillages du parc pour ne choisir que ce dont nous aurions besoin pour créer un bouquet évoquant la vie jaillissante… déjà en hiver.
Eviter d’avoir à utiliser la poubelle, choisir un style (naturel ou symbolique), puis un vase dans les trésors de l’atelier de Marie-Thérèse… et se lancer ; sans se laisser compliquer intérieurement par trop de méthodes ni par les doutes et les hésitations qui vont avec !

La beauté émane de l’intérieur et procède de l’ordinaire d’un jardin.

« La simplicité est inépuisable » nous a convaincus Marie-Thérèse. Nous voilà donc tous partis en promenade faire notre cueillette, nos regards rendus à leur fraîcheur.
Et nous avons appris ceci :
….. Une fleur est belle, dix fleurs sont jolies, cent fleurs sont vulgaires, la profusion étouffe le souffle
Et nous avons appris cela :
….. Créer selon le vide, voilà la vraie création. Si la végétation est la chair du bouquet, le vide est sa moelle.
Et nous avons encore appris
….. qu’à l’automne, les arbres, préparent leurs bourgeons. Le soleil s’affaiblît et baisse mais déjà la vie prend le dessus.
Et encore
….. que le fond blanc d’un mur est un espace de déploiement pour le bouquet : alors les murs ne sont plus des murs…
Et toujours
….. combien il est important d’aller dans le sens de ce qui est, de ce qui pousse : créer, c’est d’abord accompagner le vivant.

Nous nous sommes sentis les bienvenus dans le jardin, l’atelier et la serre de Marie-Thérèse et quelle ne fut pas notre joie de voir de nombreux vases façonnés par nous, les potières de Saint Palais, en attende d’être choisis par les « jardiniers » de sensibilité Zen que nous avons été une matinée durant, transfigurés par des bouquets lumineux.

L’expérience est à renouveler. Merci Marie-Thérèse.



OCTOBRE 2016 - DES MAINS QUI DONNENT DES AILES


Chaque année au mois d’octobre, notre atelier en kit dans la voiture, nous mettons le cap au Nord et filons vers la Rochelle, pour animer une formation en partenariat avec le Gerfi, destinée aux professionnels du monde de la Santé et de l’Education.

Chacun retrousse ses manches, travaille assidument et après une semaine d’expérimentation et de réflexion, retourne chez lui, normalement en mesure de monter dans son institution, un atelier terre à moindre coût et d’animer efficacement et durablement l’activité créative.

Le grand bénéfice de l’argile, c’est de découvrir combien rien n’est grave car tout peut se recommencer !
Car : « l’artiste prend conseil de ce qu’il a fait » (Alain).
Les réussites autant que les maladresses relancent, éveillent.

Tout est aventure et point de départ. La si plastique argile peu à peu nous rend plastiques, autrement dit, adaptables ; et ce n’est pas là le moindre de ses cadeaux.

Si former c’est mettre en appétit, avant d’offrir un peu de nourriture substantielle, cette année encore, nous n’avons pas perdu notre temps, du moins à écouter Jean.
Laissons-lui la parole :
« Le plaisir de travailler cette matière est devenu presqu’un besoin ; ça me procure un bonheur immense, dont je ne perçois pas les limites. Les jours où je ne touche pas à l’argile, je réfléchis, cherche des idées de création. Vous m’avez contaminé. C’est un virus bienfaiteur. »
Et encore
« Rien ne sert de vouloir aller plus vite pour gagner du temps. C’est toujours l’argile qui va où elle veut. J’ai bien noté qu’il fallait savoir jouer avec l’imprévisible souplesse de la terre plutôt que de vouloir tout contrôler. Comme je manque d’expérience, il faut tout recommencer encore. Mais rien ne se perd vraiment. J’apprends toujours quelque chose de plus.
Merci encore pour cette complicité avec l’argile que vous avez transmis. Quel bonheur cette matière ! »


Tiens bon Jean. Expérimente. Le potier catalan Artigas disait à qui voulait l’écouter :
« un four sans essai est un four raté ». N’oublie pas !



JUILLET 2016 – LANDEVENNEC


Dans le dialogue quelque peu surréaliste, André Breton demande à Giacometti :
- Qu’est-ce que ton atelier ?
et le sculpteur de répondre
- Ce sont deux petits pieds qui marchent.

Il ne pouvait livrer plus juste définition, tant c’est pas à pas et au jour le jour que toute démarche artistique ou artisanale nous déplace.

Avec un peu d’humour, ajoutons qu’en été et à l’automne, nous glissons quant à nous bien souvent notre atelier en kit dans la camionnette, pour filer autant que les encombrements le permettent, vers des destinations où des artistes en herbe nous attendent.

L’abbaye de Landévénnec dans le Nord Finistère a donc ouvert cette année encore, la série de nos déplacements saisonniers.
C’est là que se fixa Saint Guénolé avec ses compagnons : « un lieu secret au creux de la clairière, tourné vers le soleil levant, le premier tous les ans à pousser ses fleurs et ses bourgeons et le dernier à perdre ses feuilles. Un jardin où récolter les fruits non seulement de la terre mais encore et surtout ceux du ciel… » écrit Gurdisten, Abbé de Landévénnec en 860 dans son récit sur la vie de Saint Guénolé.

Aujourd’hui le moine poète du lieu, frère Gilles, écrit à son tour que dans un tel endroit « nos pas ont la lenteur de la sève et notre sang bat à l’unisson de la forêt. »

Avec ses 15 siècles d’existence, l’Abbaye Saint Guénolé est la plus ancienne abbaye bretonne, aujourd’hui encore habitée par des moines. La nouvelle abbaye fut reconstruite près du site historique entre 1950 et 1965 grâce à la générosité des bretons.

Elle dispose d’un très important fond d’ouvrages et d’archives qui est devenue la « bibliothèque bretonne » et ne cesse de s’enrichir au fil des ans, tant son destin est d’être uni à celui de la Bretagne.
Ainsi, des vies consacrées à Dieu peuvent aussi être des vies consacrées aux hommes et passionnément intéressées par leur culture.

Une fois encore la salle Ty Melen (la maison jaune) grande salle entre bois et mer, mise à notre disposition a permis à un petit groupe énergique de se pencher studieusement sur quelques pages de la Bible et ensuite, de laisser les mains et l’argile devenir deux amies intarissables qui se racontent plein de choses joyeusement !
Bien entendu, tout ceci, dans le respect le plus complet de la liberté de chacun en son chemin spirituel !



JUIN 2016 - VISITE de SUAD


Que fut grande notre joie d’accueillir à nouveau Suad, qui revient aux beaux jours, fidèlement nous voir, de Palestine ou d’Irak.
Ancienne stagiaire d’Earlham (université Quaker américaine) avec qui nous avons partagé en 2002, atelier et découverte du Pays basque et de sa culture, Suad est devenue depuis une si précieuse amie.

Aujourd’hui, 14 ans plus tard, elle est responsable d’une équipe de 250 personnes en majorité irakiennes, qui travaillent pour une ONG internationale basée pour le Moyen-Orient à Erbil et Damas.

Travaillant avec acharnement et prenant à bras le corps bien des situations de souffrance dans un pays en guerre, quand elle rentre chez elle en Palestine se reposer et voir les siens, c’est encore dans un pays en guerre…

C’est pourtant avec beaucoup d’humour qu’elle nous partage à chaque passage, sa vision politique des événements et la réalité de terrain. Suad ne s’interdit pas le sens critique, ce qui nous stimule à nous interroger avec nos amis et nos voisins sur ce que paix et justice peuvent bien vouloir dire, concrètement, pour nous, aujourd’hui.

Tous, nous avons en commun la volonté de chercher et Suad se charge, de nous libérer des étroitesses de l’émotivité quant aux événements, qui nous prive trop souvent d’un vrai souffle humain et universel.

Un chaleureux merci à cette jeune amie palestinienne et souhaitons-le : à l’année prochaine !



MAI 2016 - ADICHAT MONIQUE !


Mi-juin, début de l’été ou presque.
Bientôt les brebis, les vaches et les chèvres vont monter dans les estives.
Elles vont là où l’herbe est bonne.
A partir de cette année la transhumance sera sans Monique, l’amie si chère, brutalement partie vers plus haut infini, que sa montagne de Manabaigt.

Avec sa sœur Brigitte, Monique a fait partie des toutes premières femmes à monter en estive avec leurs enfants.
Résolument humaine, bergère, poète aussi, Monique appartenait aux derniers rebelles qui donnent encore un nom à chacune de leurs bêtes.

« Nous ne sommes que de passage », nous écrivait-elle « et pourtant nous voudrions toujours être là et que les amis ne meurent pas… C’est mieux de mourir au printemps. »

Depuis son grand départ, il y a des jours avec et il y a des jours sans. Il y a des jours sans où il faut faire avec et il y a des jours avec où il faut faire sans. Si mourir c’est, au printemps, s’échapper vers la lumière, vivre, c’est continuer à vivre nos vies dans les lueurs, sans lassitude, sans tout comprendre.

Continuer en n’oubliant jamais la lumière qui habitait les yeux de Monique, tout ce temps où il y a des jours avec et des jours sans…



AVRIL 2016 - VACANCES, ENTRE LES MURS DE L’ATELIER



« Sous un seul arbre une grande terre » dit un proverbe africain.

Quelle joie de voir, en ce printemps, notre atelier élargir ses murs et son toit pour accueillir des langues et des cultures si différentes.
Catalan, castillan, argentin, suisse, écossais, peut être tôt ou tard palestinien car l'affaire est en cours, mais aussi basque, breton, parisien, tous ces accents résonnent encore, transformant notre modeste atelier en une grande terre pour notre plus grande joie.
Les hommes sont beaux de mille langues partagées ensemble mais aussi de mille âges et de mille conditions de santé.

Disons-le à nouveau : nous sommes aussi ravies de voir les vacances entraîner grands mères et petits enfants jusqu'à l'argile. Nous zigzaguons avec bonheur entre les âges qui ont tant à s'apporter mutuellement. La dimension trans-générationnelle de la vie créative d'atelier reste un de nos enjeux préférés.

« Quand Dieu a crée le temps, il en a fait assez » disent encore les africains...



AVRIL 2016 - « SORS ET APPRENDS »


« Sors et apprends » est l'une des devises auxquelles nous tenons et que nous souhaitons très régulièrement honorer. Ainsi se renouvellent nos énergies.
En ce mois d'avril nous sommes donc sorties en terre d'enfants, en terre d'école.
Largenté, institution scolaire bayonnaise s'il en est, a fait appel à nos compétences de potières pour aider des élèves de CM2 à se découvrir, TOUS, sans exception, doués de leurs dix doigts et confiants en les si nombreuses possibilités de leurs mains.

Une semaine entière était consacrée à cet objectif par la maîtresse et nous intervenions, quant à nous, le dernier après-midi, juste avant l'envolée en vacances. Ambiance assurée bien sûr et occasion de ne jamais oublier combien l'enfant est le miracle de la vie, et qu'une trentaine d'entre eux, ensemble, à deux heures de la liberté vacancière et les mains dans la terre, cela devient … le triomphe de la vie !



AVRIL 2016 - FORUM à BAYONNE


Le Samedi 9 avril, nous participions à un forum à Bayonne toujours, intitulé « pour demain » ou en basque « Foroa biharko », une journée pour apprendre à vivre toujours mieux la diversité des façons d'être et de penser.

Nous aimerions partager avec vous l'objectif des organisateurs en reprenant leurs propres mots, tellement ils nous ont semblé bien choisis et de surcroît parfaitement appliqués sur le terrain.
« Il y a des époques où l'on ressent des urgences. Ce qui nous soudait ne tient plus, ce qui nous faisait rêver s'est obscurci. Mais on ne peut vivre sans rêver et on en peut rester seul.
D'où ce forum, foire de rencontres, d'idées, de projets, sans autre règle que l'abandon des préjugés et la liberté pour tous de penser et de croire hors de toute violence. Penser une nouvelle terre, libérer l'Esprit, et vouloir bien vivre ensemble, quel programme ! A vous d'apporter votre pierre, elle est nécessaire. »

Sitôt entendu sitôt fait : nous avons donc apporté nos kilos d'argile, persuadées que la réalité vécue en terme de rencontres, correspondrait, une fois encore, aux si beaux mots prononcés. Ce fut le cas.
Pour notre part après avoir tenu un stand aux côtés de nombreuses associations engagées à la construction d'un monde plus solidaire, nous avons aussi animé un atelier « architecture terre » et parole, intergénérationnel bien sûr.
L’aînée et sans aucun doute la plus jeune de cœur de notre groupe, fêtait ses 90 ans. Venue découvrir l'argile, merveilleux vecteur de parole, on a vite découvert qu'elle apprenait chez elle à créer aussi des tableaux grâce au logiciel Photoshop, eu égard à ses doigts douloureux.
Avancer en âge avec tant d'énergie, de fraîcheur et de complicité avec les générations plus jeunes : un rêve pour tout le monde !

Apporter sa pierre et sa terre donc, mais aussi s'enrichir de celle des autres. Anaiz Funosas de l'association Bake bidea, J.P Massias, professeur de droit public ayant les conflits du monde entier pour terrain et Peio Ospital d'Atxik Berrituz, nous ont aidé avec tant de compétences à comprendre combien il était important de ne réduire personne aux violences commises que l'on soit d'Afrique du sud, du Congo, du Rwanda ou tout simplement d'ici.
Pour bâtir la paix, la société civile a décidément un rôle majeur à jouer, comment ne pas en être convaincu après les avoir écoutés ? Nous avons été particulièrement passionnées par toutes ces expériences de justice transitionnelle, si riches dans leurs diversités.

Merci aussi à l'économiste Elena Lasida qui a convaincu une assemblée bien fournie, combien il était nécessaire que l'écologie devienne aussi une expérience spirituelle.

Ensemble, prendre soin du sens et des mots est toujours une aventure dont on sort dynamisé et régénéré par l’espérance. Notre gratitude va donc vers cette équipe qui organise tous les deux ans ce Forum et qui cherche, paraît-il, de nouvelles recrues… A bon entendeur…



MARS 2016 - NOUS AVONS DESSINE SANS COMPLEXES ! »


Tout d'un coup, quelque chose de neuf et d'inattendu s'est passé à l'atelier : papier en feuille ou en rouleaux, pinceaux, brosses, crayons, feutres, bâtons de fusain et de pastel, encres de toutes les couleurs avaient remplacé, sur la vaste table de travail de notre atelier, les habituelles boules d’argile fraîche !
Changement de cap : pourtant si complémentaire à notre habituel travail en volume… cette fois-ci, nous allions habiller de toutes les manières possibles, les grandes surfaces blanches qui nous étaient offertes (merci au passage à « Espace copie » pour la récupération de ses chutes de papier) !
Grâce à l’inventivité sans limite de Marion, dont nous suivions avec grande docilité les consignes (enfin presque !), nous sommes passées en un clin d’œil, du trait hésitant et un peu méticuleux, aux grandes volutes virevoltantes qui tout à coup se sont mises à danser, à se poursuivre, à s’entrelacer dans une joyeuse sarabande colorée.
Pas à pas, ou plutôt main à main, et mine de rien (mine de crayon bien sûr) nous sommes passées à la construction en rythme, au dessin les yeux fermés… avons découvert que notre main gauche suivait en miroir la droite pour peu que nous la laissions faire, que l’on pouvait dessiner à main levée sans regarder notre papier et que c’était, sinon ressemblant, toujours surprenant ! que dessiner avec un pinceau qui pend au bout d’une ficelle, c’est entrer dans une démarche de grande démaîtrise qui peut nous entraîner, dans des grands éclats de rire, plus loin qu’on ne pourrait penser !
Mais, nous ne pouvons tout dévoiler, car cela se découvre et se goûte et se vit dans les mains, les bras, les épaules et tout le corps finalement, car… pour terminer cette journée avec toutes nos mains déployées, nous avons fait danser la barbotine, délicieusement douce au rythme du jazz et de la musique classique !



JANVIER 2016 - HOMMAGE à ANTOINE et VICTOR


Nous aimerions pour ce premier article, rendre hommage à deux «jeunes hommes de l’ombre » grâce auxquels nous communiquons avec vous depuis si longtemps.
Cette année 2016, nous fêterons le dixième anniversaire de notre entrée dans le monde de l’informatique ! Pressées de toutes parts, nous avions non seulement consenties à nous équiper d’un ordinateur mais aussi à la réalisation d’un site pour donner une meilleure visibilité à Parole et Racines. Pour Les dinosaures que nous avons la réputation d’être, ce fut une belle aventure, atypique s’il en est !
Sollicités par un ami, ce sont deux jeunes informaticiens-designers-programmateurs-infographistes parisiens qui se sont attelés à la tâche, en lien avec nous par courrier et téléphone ! Victor à l’infographie et Antoine à la programmation ; mission accomplie en un temps record, avec succès et sans aucun raté !
Ce fut pour eux une première collaboration de laquelle est sorti notre site, tel que vous pouvez le visiter encore ; mais pas seulement, car Antoine et Victor après avoir travaillé ensemble, ont eu l’idée de s’associer ! L’entreprise d’Antoine s’appelait alors Slowsimmer (qui mijote doucement) ; la nouvelle-née s’est appelée Fastboil (qui bout à gros bouillons) !
Puis Antoine m’a initié aux rudiments de la mise à jour ; a hébergé gratuitement notre site depuis 10 ans et prodigué sans avarice ses conseils, avec comme seule rémunération une tome de fromage de brebis pour Noël, devenue incontournable il faut le dire.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là ; fin décembre un virus malveillant, malencontreusement introduit dans notre ordinateur par une pièce jointe trop vite ouverte, a rendu illisible par cryptage la quasi-totalité de nos dossiers (documents, photos, mails…). Panique et longue incertitude pendant les temps de fête ! En fin de comptes, en mettant toutes les sauvegardes bout à bout, le puzzle n’avait plus que quelques trous. Ouf ! Une amie nous a prêté un portable « en attendant » ; mais il nous faut nous rééquiper et le devis est inévitablement élevé puisqu’à nouvel ordinateur il faut aussi ajouter nouveau scanner et nouvelle imprimante (merci l’obsolescence et et la dictature de Microsoft !). Mais, c’est sans compter sur Fastboil qui, « par hasard a un ordinateur qui traîne et qui ne sert à rien ».
C’est donc encore une fois grâce à « nos hommes de l’ombre » que nous continuerons à communiquer.
Merci Antoine, merci Victor.
PS Le siège de leur entreprise est situé Boulevard de Charonne. Relier ainsi par la solidarité ce lieu douloureusement marqué par la violence à nos paisibles montagnes, n’est pas sans signification symbolique !

NOVEMBRE 2023
Dessins à l'encre de Marion













Histoires d'Arbres...


Pays Basque

La Réunion

Tanzanie

Pays Basque

ETE 2023
L'oasis d'En Calcat


Prairial - Dom Robert

Vitrail de l'oratoire

Entrée de l'Hôtellerie

Prairial - Dom Robert


A vos jumelles







Du poème aussi vital que l'eau








Attention où nous rangeons notre mémoire










PRINTEMPS 2022
Les arbres qui font penser









PRINTEMPS 2022
Les arbres-moines










PRINTEMPS 2022
Découdre les mots






NOVEMBRE 2021
Parution de
"Nul ne saisit le vent"






ETE 2021
Le luxe d'être Mozart








Juillet 2021
Supplique pour les Abels du Pays Basque










Novembre 2020
Spéléologie linguistique











Octobre 2020
L'art du "rater/rebondir"






Septembre 2020
Panier de figues







Flammes et lumière






Août 2020 :
Le bon zèle







Eté 2020 :
Visible-Invisible










Juillet 2020 :
Le bon vieux réel






Mars 2020 :
la texture de nos tempêtes








Février 2020
Oser notre liberté


Arbres stériles, arbre de Vie

Se relever après la déchirure




Bon et joyeux NOEL !
Avec la crèche de notre amie Régine :
Les santons d'Arbaila ont voyagé jusqu'en Provence






Décembre 2019
Le Bon Samaritain :
histoire de toucher
et de se laisser toucher


Le blessé laissé pour mort

Un bandit

Le bon samaritain




Novembre 2019
La pluie froide que l'on prend dans ses mains






Octobre 2019
Mettre les petits pas
dans les grands


Cette année, du 30 septembre au 4 octobre, nous avons eu la chance, grâce au GERFI de la Rochelle (comme chaque année depuis bientôt 20 ans !) de former un solide petit groupe constitué d’éducatrices spécialisées, AMP (Aide Médico Pédagogique), ergothérapeutes, infirmières en hôpital psychiatrique… à l’utilisation de l’argile dans leurs structures respectives mais aussi, en amont, à créer de toutes pièces un atelier terre.
Et toujours nous nous émerveillons de la capacité de chacun à construire sa trajectoire professionnelle « à partir » de la fragilité des uns et des autres et non pas « contre ». Ils et elles ne cherchent ni à la réparer (il s’agit le plus souvent d’une fragilité irréparable) ni à la sous ou sur estimer, mais à voir où pourrait être sa fécondité.
Et de fait, elle en a une, puisque la fragilité est la base d’une véritable interdépendance, contrairement à l’autosuffisance qui crée de la rivalité.
« Si nous croyons que la fragilité peut ouvrir à du radicalement nouveau, il s’agira de féconder le vide qu’elle produit », écrit Elena Lasida. « cette posture de fécondation correspond à la création : on ne sait pas d’avance ce qui peut advenir et on fait de la place pour engendrer de la nouveauté radicale ».
Souhaitons que de nouveaux ateliers naissent ici et là, au service et avec les personnes les plus fragiles.
Monter un atelier ? « Une idée qui fait son chemin, met-elle les petits pas dans les grands ? » interroge le poète Gilles Baudry.
Va pour les petits pas qui nous aident à franchir les grandes distances !



Octobre 2019
Les éphémères






Aout 2019
Pourquoi les clowns ont le nez rouge ?



abécéd'rêve




Juillet 2019
L'oeil de l'âme
"Le bonheur simple"





Avril 2019
Participer à un million de révolutions tranquilles




S'élancer sans s'empresser



De Lacan en Ferenzci...
De Freud en Winnicott








Janvier 2019
Fleuve plein désire être rempli







1er Janvier 2019
Bonne année !





Automne 2018
Les terres des possibles








Septembre 2018
Le potier chinois





Août 2018
Agir, c'est connaître le repos






Août 2018
Une poignée de forces bienveillantes





Juillet 2018
Pour arriver plus vite à l'atelier






Juillet 2018
l'art difficile de ne rien faire






Mai 2018
Bible et argile ?


ça ne s'explique pas, ça s'expérimente.
Durant le Festival de la Foi à Pornic et St Michel Chef Chef, du 21 au 25 mai, on l'a vite compris.
Les deux salles étaient pleines de potiers et herbe ou déjà confirmés. Il ne s'agit pas de décorer un texte biblique, mais d'explorer. Autrement dit, de crever la seule surface d'une lecture.
L'audace est donc nécessaire, car personne ne sait d'avance ce qui se passera. Il n'y a pas de poteaux indicateurs.
Après avoir "religieusement" écouté quelques consignes destinées à favoriser l'acte de créer, les mains n'ont plus qu'à avancer dans l'inconnu.
Modeler, c'est prendre le temps de mûrir et d'adresser une parole qui touche, émeut, dérange, bouillonne, ouvre une fenêtre, fait voir les textes autrement.
"Créer, c'est être l'hôte de quelque chose qui vient du plus loin possible, du plus inconnu et c'est savoir accueillir ce don" (S HantaÏ)
Au fond, d'expériences en tâtonnements (dont personne ne peut faire l'économie) la question n'était pas tant de découvrir la Bible que d'y entrer à fond, de commencer à s'y sentir chez soi et puis d'en faire toujours plus le livre de tous les hommes


Mai 2018
Depuis les rues de Paris



Oeuvre de Danièle


Mai 2018
Saveur du Silence





Février 2018
Peut-on être trop bon ?










Février 2018
Comment franchir les murailles ?





Janvier 2018
Notre site renouvelé





Novembre 2017
Atelier d'écriture à Rhuys






Septembre 2017
Déguster





Août 2017
Le plaisir de pratiquer l'hospitalité





Juillet 2017
Internet et nous





Juin 2017
Depuis la Bretagne


Des amis sont venus nous visiter...


se ressourcer aussi
et nous ont laissé ce poème

Subtil
Gracile
Facile
Fragile
Tranquille
Lexomil
Ile
Cil
Pile
Profil
Idylle
Argile

Avec vous les espaces et les sentiments.

Merci, c’étaient de chouettes moments ensemble et avec vous.


Mai 2017
Voyage au pays du toucher





Avril 2017
Visite du bout du monde


Etudiant pour six mois à Bilbao, Faris de Ramallah est venu nous visiter. Après la mer, c'est aussi la montagne qu'il découvrait pour la première fois !






Printemps 2017
Les vaches arrivent dans les prés et sur les murs
Elle s'appelle Olga





Octobre 2016
La voie des fleurs








Juillet 2016
Landévénnec







AOUT 2016 - « UN SEUL BRACELET NE TINTE PAS »


« Il y a des gens qui ressemblent aux tisons qu’il faut pousser dans le feu pour qu’ils s’enflamment » dit-on en Afrique.
Eh bien ce n’est pas le cas du Burkinabé Christophe, guide, éleveur et chercheur d’or, et de sa compagne Françoise, venus visiter il y a peu dans notre atelier.
Passionnés par les cultures ils le sont, grâce à eux nous avons pu savourer autour d’une table, une des spécialités culinaires du Burkina, à la pâte d’arachide. Une merveille de saveurs.
« Un seul bracelet ne tinte pas » nous prévient Christophe, manière de dire combien il lest donc essentiel d’échanger nos savoirs en toute occasion.
Et c’est ainsi que nous avons appris qu’au pays des hommes intègres :
  • L’argile se ramasse dans les mares et les cours d’eau et non dans les carrières ; on la transporte dans des paniers portés sur la tête, puis dans les charrettes tirées par des ânes ou à bicyclette.
  • L’atelier est situé dans l’enceinte résidentielle et on ne façonne qu’au colombien. Christophe n’avait jamais vu travailler au tour. Il ne cacha pas son émerveillement de découvrir visuellement cette technique.
  • Les potières du Burkina utilisent de la chamotte de tessons de vielles poteries réduites en poudre ou de l’argile à gros grains, naturellement sablonneuse et parfois elles estampent leurs pièces en creusant directement un grand trou rond dans le sol, qui servira de moule par moulage renversé sur des formes convexes.
  • On lisse le bord des pièces en les frottant avec des feuilles d’arbres ou des gousses puis avec un galet mouillé.
  • Les décors sont la signature de l’atelier et sont souvent effectués au peigne, à la brindille, au couteau ou à la cordelette. On marque à la cendre les poteries pour empêcher les mauvais esprits de venir casser le travail pendant la cuisson, cuisson qui est réalisée au bois, dans un trou d’un mètre cinquante de diamètre environ, les pièces sont recouvertes de paille, puis de bois et de crottin et de bouses de vaches, semble-t-il.
  • Pour obtenir la teinte noire, les potières recouvrent les pièces d’un mélange végétal gluant (gousses de néré) qui leur donnera un aspect brillant.

Ainsi Christophe et Françoise nous ont fait voyager.
« Allons, chapeaux, gilets, les deux poings dans les poches et sortons ». (A. Rimbaud)
Miracle des rencontres qui nous permettent de nous envoler loin… sans bouger de l’atelier.
« Aucun souhait ne vaut mieux que celui-ci « Que Dieu laisse sur toi le mystère » dit-on en Afrique.
Mystère qui nous donnera envie de nous revoir !


Juin 2016
Visite de Suad





Mai 2016
Adichat Monique


En mai 2014, nous montions ensemble les chèvres à la cabane de Manabaigt au pied de l'Ossau




Où Monique aimait tant traire ses bêtes au grand air




Nous étions en bonne compagnie





Une autre année, nous avons accompagné le troupeau à la redescente vers son village de Ledeuix près d'Oloron Sainte Mairie, soit une bonne trentaine de kilomètres




Les bergers et les chiens doivent aussi se reposer




La traversée de la ville ne manqua pas de faire sortir sur le pas des portes toutes les générations attirées par le bruit incongru des sonnailles.
Monique était fière de ses bêtes et voulait renouer avec cette tradition de descendre les bêtes à pied.
Ce fut la dernière fois.
Du cimetière où elle repose, elle contemple à sa manière bien à elle la montagne d'Osse qu'elle aimait tant  !




Printemps 2016 - OUVERTURE OFFICIELLE DU GÏTE D’ELHORDOI


Le mot hôte est intéressant en français car il signifie à la fois celui qui reçoit et celui qui est reçu.
Cette ambivalence est pleine de sens puisqu’elle induit que l’accueillant et l’accueilli sont le revers et l’avers d’une seule réalité : la chance de se rencontrer.

Notre gîte, dont nous avons terminé les aménagements en juin, nous permet enfin d’être replongées dans l’émerveillement de découvrir de nouveaux visages venant des quatre coins de France, à la découverte de cette terre encore tranquille même au mois d’août, située entre rivières, mer et montagnes.

Longue vie au gîte d’Elhordoi et aux échanges de culture dont il est vecteur !


Avril 2016
Forum à Bayonne







Mars 2016
Nous avons
dessiné sans complexes !















Janvier 2016
Hommage à Antoine et Victor



"Ouvrir, élargir, accueillir,
ce sont les verbes de la santé.
Vivre serait ainsi
un artisanat de l'ouverture"
F. Carrillo




Le Clapotis
Pourquoi donc ce titre ?


Faisons un détour par l’étymologie :
Dans son édition de 1878, le Littré, dictionnaire de la langue française (5 kg pour aller des lettres A à C tout de même ) nous apprend que le mot clapotis ou son synonyme, clapotage, désigne « le mouvement vif et rapide des vagues et surtout, le bruit qui résulte de ce mouvement que le vent communique à la mer et qui soulève à sa surface des ondes courtes et pressées »… que tous ces mots de la même famille, claper, clapot, clapotant, clapoteux… ont une racine allemande klappen, « faire du bruit ».



Retenons de cette définition ce quelque chose qui s’apparente à de l’urgence, qui semble fait pour attirer notre attention ; il y est question du mariage de l’eau et de l’air, de la mer et du vent, d’un mouvement vif qui se transmet et qui circule.



C’est cela que nous aimerions vous partager dans « le clapotis des jours » : ces petits mouvements infimes de la vie, ces événements insignifiants qui se conjuguent entre eux et soulèvent à la surface de notre vie « des ondes courtes et pressées» qui font d’elle autre chose qu’une mer d’huile ou une eau stagnante, un liquide aux normes et mis en bouteille sagement étiquetée ; ces événements insignifiants en apparence, qui font de notre vie une source qui gambade, charrie aussi son lot de troncs et de débris, mais grossit de rencontrer d’autres ruisseaux…




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